25 ans déjà : Hockenheim 94, Berger ressuscite Ferrari
par Nicolas Anderbegani

25 ans déjà : Hockenheim 94, Berger ressuscite Ferrari

1400 jours ! Un gouffre, une éternité ! Le 31 juillet 1994, sur l'ancien tracé ultra rapide de Hockenheim, Gerhard Berger met fin à la plus longue disette de victoires subie par Ferrari en Formule 1. Car si le cheval cabré a souvent connu des crises, il a toujours fini par se relever.

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Les années noires

Au Grand prix d'Espagne 1990, Alain Prost remporte sa 5e victoire de la saison avec Ferrari, avant que le championnat ne se termine dans les graviers de Suzuka. Ferrari l'ignore encore mais cette victoire sera suivie par la pire traversée du désert de son histoire. La Scuderia avait déjà connu par le passé des passages à vide, mais jamais si longtemps et jamais dans un tel contexte de polémique et de tensions.

Après les espoirs de 1990 et une intersaison optimiste, 1991 ressemble à une tragique Comedia dell'arte pour la Scuderia, minée par des querelles intestines de pouvoir, consécutives à la disparition du Commendatore Enzo Ferrari en 1988. Monoplace ratée, fiabilité déplorable, luttes de clans, négociations secrètes pour recruter Senna dans le dos de Prost...l'action dans les coulisses -et les désastres en piste- font les choux gras de la presse. Dans ce panier de crabes rouges, le directeur sportif Cesare Fiorio puis Alain Prost - avec sa fameuse déclaration sur le "camion" - payent les pots cassés et sont limogés sans ménagement. Le président de Ferrari Piero Fusaro est à son tour débarqué par FIAT et remplacé par un revenant, Luca di Montezemolo, qui décide de remettre de l'ordre dans ce navire en perdition adepte des intrigues byzantines.

En 1992, pas de miracle. La F92 est un boulet, avec un double fond plat qui la rend inconduisible. Ferrari de surcroît a raté le virage technologique de la suspension active. Pendant que Mansell se balade avec la Williams-Renault, Jean Alesi se démène comme il peut et ramène miraculeusement quelques podiums, alors que son pauvre équipier Ivan Capelli y laisse sa réputation et sa motivation.

L'effet Todt

En 1993, la F93 est légèrement meilleure, mais elle accuse un grand retard au niveau des aides électroniques (qui sont alors à leur apogée) et sa fiabilité demeure désastreuse. Toutefois, un tournant s'amorce avec le recrutement de Jean Todt, qui prend ses fonctions à partir du grand prix de France. Auréolé des succès obtenus sous sa direction par Peugeot en rallye et en Endurance, le team-manager français est, pour Montezemolo, l'homme de la situation afin de réorganiser la Scuderia et de la remettre sur les bons rails.

Jean Todt lance une vaste restructuration et embauche à tour de bras. Une de ses premières décisions est de faire revenir l'ingénieur anglais John Barnard à la direction technique et de recruter pour le département moteur l'ingénieur Osamu Goto, le père des V10 et V12 Honda.

En 1994, la règlementation de la F1 change profondément avec la suppression des aides électroniques et le retour des ravitaillements en essence, qui ne sont pas pour déplaire à Ferrari dont le V12 est très gourmand. La 412 T1 conçu par Barnard rompt radicalement avec ses devancières, en proposant un nez haut, une carrosserie très travaillée, des suspensions innovantes et une boîte de vitesses transversale. A Imola, une nouvelle version du V12 est alignée, avec un angle de 75° et surtout une puissance de 830 chevaux, soit plus que le V10 Renault.

Dès le début de la saison, la 412 T1 se montre performante. Alesi est 3e en ouverture de saison au Brésil et au Canada, Berger 2e au Pacifique, 3e à Monaco et en France. Alesi s'est qualifié en première ligne à Montréal et les deux monoplaces italiennes ont occupé la 2e ligne en Angleterre. Malheureusement, la performance est contrebalancée par les soucis de fiabilité et la gloutonnerie du V12, qui oblige les 412T1 à embarquer davantage d'essence et donc de poids...

Le salut vient d'Allemagne

Sur l'ancien tracé Hockenheim et ses interminables lignes droites, le V12 Ferrari fat merveille et les deux Ferrari sont en première ligne ! Berger a conquis la pole, la première du cheval cabré depuis...Mansell au Portugal 1990! Alesi est à ses côtés, mais la malchance ne le lâche pas. Lors de la 2e séance qualificative, l'avignonnais a...perdu son capot moteur a pleine vitesse !

Le jour de la course, c'est la canicule à Hockenheim avec 50° sur la piste. Au départ, Berger s'envole parfaitement, suivi de près par Alesi. Mais derrière, c'est l'hécatombe ! 10 voitures sont éliminées, dont une partie par la McLaren de Mika Hakkinen qui est parti à l'équerre en se rabattant sur Coulthard et a traversé la piste de part en part ! Pas de drapeau rouge ni de safety-car (les temps changent...), la course continue comme si de rien n'était !

Dans la première ligne droite...le moteur d'Alesi s'arrête net, coupure électrique ! L'avignonnais avait opté pour la nouvelle version 043 du V12, plus puissante... Décidément, le chat noir a élu domicile dans la Ferrari n°27...

Alors que le premier tour n'est même pas terminé, la quasi-moitié de la grille est déjà hors jeu ! Berger se retrouve solide leader devant...Ukyo Katayama sur sa modeste Tyrrell-Ford ! On croit rêver. Cependant, Michael Schumacher prend rapidement le dessus sur le japonais et remonte vers la tête de course. Si la Ferrari est intouchable dans les lignes droites - le V8 Ford de la Benetton doit s'avouer vaincu- Schumacher recolle à l'autrichien dans les freinages et les parties sinueuses du Stadium. Schumacher trépigne et tente plusieurs dépassements, avant de s'arrêter aux stands pour tenter l'undercut. Sauf que la stratégie n'aura pas le temps d'être vérifiée, puisqu'au 20e tour, le V8 Ford rend l'âme. Quelques tours plus tôt, l'autre Benetton de Jos Verstappen s'est transformée en barbecue. Un weekend à oublier pour les hommes de Flavio Briatore, mais la saison des polémiques ne fait que commencer !

La menace Schumacher éliminée, le reste de la course est une formalité pour Berger, qui bénéficie d'une avance conséquente sur...les Ligier-Renault de Panis et Bernard. A l'issue du 45e tour de course, l'autrichien redonne enfin le goût de la victoire à Ferrari. Une délivrance après 4 ans d'humiliations, de crises, de doutes et de colères. Au téléphone, Montezemolo ne pourra retenir quelques larmes en discutant avec Jean Todt qui a réussi son pari : en 1 an, avec certes de la chance, remettre une Scuderia Ferrari exsangue sur le chemin du succès. Même le public allemand, privé de sa star Schumi, reporte sa joie sur Berger, acclamé comme jamais sur le podium !

Hockenheim 1994, c'est la première pierre d'un édifice qui règnera sur la F1 quelques années plus tard, avec un certain Kaiser.

Images : Ferrari, F1

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Pour résumer

1400 jours ! Un gouffre, une éternité ! Le 31 juillet 1994, sur l'ancien tracé ultra rapide de Hockenheim, Gerhard Berger met fin à la plus longue disette de victoires subie par Ferrari en Formule 1. Car si le cheval cabré a souvent connu des crises, il a toujours fini par se relever.

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