Scandale du chrome : interdit dès 2024 pour raison de santé
par Thibaut Emme
Quelle alternative pour l'automobile ?

Scandale du chrome : interdit dès 2024 pour raison de santé

Même si on est loin des voitures dégoulinantes de chrome des années 60, le chromage reste une pratique courante en automobile. Pourtant il va être interdit dès 2024 pour des raisons de santé.

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Quels sont les risques pour la santé du chromage ?

Depuis des dizaines d'années, on utilise le procédé galvanique pour chromer des pièces. Ce chrome n'est qu'à visée esthétique et cherche à souligner une ligne dans le design, ceinturer les vitrages latéraux, ou créer, comme dans les années 50/60 d'énormes calandres clinquantes. Le procédé par galvanisation utilise comme son nom l'indique des courants de basse tension et divers bains.

Si des améliorations ont été apportées depuis les années 1850/1860 (invention du procédé), il reste que cela utilise des bains d'acide chromique et sulfurique. Il y a donc dans les ateliers de chromage, du chrome hexavalent dans l'air respiré. Cela augmente considérablement les risques de cancers, notamment de cancer du poumon pour les opérateurs. Ainsi, l'Europe a décidé de (tenter de) bannir le chrome hexavalent (ou chrome 6) et ce dès 2024 (*).

Quelles alternatives pour les constructeurs automobiles ?

Avec cette interdiction en Europe, se posent plusieurs questions. En effet, les constructeurs doivent trouver des alternatives crédibles au chromage par galvanisation. Il y a différentes pistes, mais pour le moment, les procédés doivent être mis en production à grande échelle. De plus, le coût supplémentaire risque d'être important selon eux.

On pourrait donc voir le chrome disparaître des voitures durant plusieurs années, le temps d'une solution pérenne. Problème : comment va-t-on faire pour les optiques ? Tout le monde n'utilise pas encore les LED et a donc besoin de réflecteurs chromés. Une solution temporaire pourrait être de remplacer les éléments chromés par de l'aluminium, ou autre métal qui, bien que moins brillant, pourrait faire l'affaire.

Le nickelage (utilisation de nickel) pourrait faire l'affaire également. Le dépôt électrolytique de nickel par galvanoplastie utilise des sels et non des acides. Sauf que le nickel vaut bien plus que le chrome. On est à un peu plus de 18 000 € la tonne de nickel contre un peu plus de 8 000 pour du chrome. En bref, ces procédés devraient renchérir le prix des pièces brillantes. Et pour certains constructeurs comme Rolls Royce ou Bentley, le nombre et la surface de pièces chromées est important.

Et pour les voitures anciennes ?

Pour l'automobile récente, les constructeurs devraient se tourner vers des alternatives, ou faire faire ces pièces hors Europe. Après tout, la Californie n'interdira la pratique qu'en 2039, et d'autres pays continueront de l'autoriser.

Mais pour l'automobile ancienne, cela risque de poser problème. Les pièces chromées des "mamies" l'ont été avec le procédé galvanique. Refaire les chromes devrait donc rapidement demander un sacré boulot pour passer à du nickel ou passer par un autre procédé. Les artisans qui font cela n'ont pas les moyens de change du tout au tout et devraient donc rester avec les procédés galvaniques, de nickel sans doute.

Pour les autres, parmi les procédés possibles, il y a les procédés de dépôt sous vide, comme pour les projecteurs plastiques. Cela passe par exemple par un dépôt de vapeur de chrome (sous protection totale NDLA), ou la projection cathodique magnétique qui consiste à ioniser une atmosphère d'argon (gaz inerte) qui va percuter un bloc de chrome, projetant dans l'enceinte des atomes qui vont alors se déposer à la surface à chromer. C'est un procédé coûteux et très très lent.

Autre possibilité, la projection thermique (ou métallisation). Là, le principe est d'avoir un gaz porteur expulsé d'une buse (ou torche) qui va transporter des particules de chrome. Ce transport est fait à haute vélocité et température pour que le métal adhère à la pièce. Mais, cela n'est valable que pour les pièces pouvant résister aux températures élevées et donc pas pour les pièces d'ornement de nos voitures.

Alt Ctrl Trans

L'automobile n'est pas la seule consommatrice de chrome et il devrait y avoir un lobby en Europe pour repousser l'interdiction. Dans l'industrie, on peut noter l'initiative "Alt Ctrl Trans" (pour ALTernative au Chrome Tri et hexavaLent pour le secteur du TRANSport et de la TRANsformation) en jeu de mot avec "Ctrl Alt Suppr" de l'informatique. Cela consiste, depuis 2019, à trouver des alternatives industriel au "chrome dur". En effet, outre un aspect brillant purement esthétique, le chrome est utilisé pour rendre des surfaces plus dures et résistantes à la friction.

Là encore, le nickel pourrait avoir son rôle à jouer avec des bains de nickel-bore. C'est la solution qui réussit à réunir le plus des propriétés du chromage, sans toutefois les atteindre toutes. Nickel phosphore et nickel tungstène pourraient compléter les propriétés recherchées. Une complexité de mise en oeuvre qui va, là aussi, renchérir les procédés.

Note : (*) le chrome 6 est théoriquement interdit depuis 2017 en Europe, mais les autorisations ont été prolongées.

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Pour résumer

L'Europe a décidé d'interdire le chromage par bains d'acides dès 2024 pour des risques accrus pour la santé des opérateurs. Le cancer du poumon est en particulier l'une des maladies déclenchées.

Pour l'automobile qui adore ces petites babioles brillantes, il va falloir se tourner vers d'autres procédés plus onéreux. D'autres pays ne l'interdiront pas, ou pas avant 15 ans. De quoi rafler la mise en attendant ?

Thibaut Emme
Rédacteur
Thibaut Emme

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