Bilan Formule 1 2020 : le championnat et le top 5
par Nicolas Anderbegani

Bilan Formule 1 2020 : le championnat et le top 5

C'est parti pour le bilan de la saison de Formule 1 2020, un cru pas comme les autres dans un contexte inédit.

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Le championnat

Une année pas comme les autres. Et finalement, un petit exploit que d'avoir organisé 17 courses en moins de 6 mois, dans un contexte de pandémie mondiale. La F1 a vacillé mais a tenu bon. Peut-on déjà prévoir les conséquences à long terme ? Mais l'essentiel a été sauvé, c'est à dire avoir un vrai championnat, signer les Accords Concorde et entériner le plafond budgétaire, pour justement sécuriser un avenir incertain.

C'est un paradoxe. Alors que l'issue du championnat n'a jamais fait le moindre doute et que les titres mondiaux ont été acquis sans réelle adversité, le spectacle en piste a été souvent de qualité. Certes, nous avons eu droit à quelques purges (Abou Dhabi, Russie) mais rares ont été les courses "ronflantes". Final sur la jante à Silverstone, vainqueurs surprise et rebondissements à Monza et Sakhir, morceaux de bravoure et scenario fou au Mugello, joutes turques sous le déluge...les courses animées ont été légion. Le DRS certes joue toujours son rôle artificiel pour faciliter le spectacle, car le fond du problème demeure : un aérodynamisme qui n'est pas pensé pour la bataille rapprochée et des pneus Pirelli dont on taira pudiquement les adjectifs que lui attribuent pilotes et fans.

Deux primo-vainqueurs avec les vibrantes victoires de Gasly et Perez, nous n'avions plus connu cela depuis 2012. Le choc de l'accident de Romain Grosjean restera aussi dans les mémoires. Il va dans dire que le retour de pistes à l'ancienne comme Imola et le Nürburgring, avec des tracés étroits qui ne pardonnent rien et de vrais bacs à sable, ou les belles nouveautés spectaculaires comme le Mugello et Portimao ont apporté de la fraîcheur et une exigence de pilotage qui font souvent défaut aux "parkings" modernes. Le retour au premier plan de l'Europe dans le calendrier a raccroché la F1 à ses racines, alors merci au Covid ? (2nd degré) Il fallait en profiter, car le calendrier 2021 doit marquer, à priori, un retour à la normale.

Aussi, derrière la domination écrasante de Mercedes, la bagarre a été âpre dans le peloton entre McLaren, Racing Point, Renault, souvent Alpha Tauri et rarement Ferrari, pour proposer de belles passes d'armes et du suspense au championnat. Les forces se sont resserrées, tout du moins derrière Mercedes, comme en attestent les batailles au millième en qualification et le match jusqu'au bout pour a 3e place chez les constructeurs.

Après, on ne peut que déplorer le fossé encore immense séparant Mercedes du reste de la meute, même si Red Bull, surtout avec Verstappen, a montré en fin de saison de belles ambitions pour 2021. Mais le nouveau règlement 2022 fait languir, dans l'espoir d'une redistribution des cartes, après un nouveau record absolu de domination dans l'histoire de la F1.

Le Top 5

1er - Mercedes, 7 sur 7

15 poles - 13 victoires -25 podiums - 9 meilleurs tours

Que dire ? Un 7e tire consécutif, nouveau record absolu pour l'armada invaincue de l'ère hybride. Même l'armée rouge Todt-Schumacher n'a pas fait autant. Mercedes a encore bluffé le paddock avec son innovant DAS et cette capacité à repousser encore plus loin le niveau de performances, en ayant amélioré la puissance du V6. Mercedes fait montre d'une grande maîtrise, mais Sakhir aura néanmoins vu l'équipe perdre pied dans les arrêts aux stands, chose rarissime, qui rappelle tout de même que cela reste une équipe humaine !

Excepté la première course, et la dernière où les séquelles du Covid se sont faites sentir, Lewis Hamilton a encore livré une copie parfaite. Toujours aussi rapide, propre et intelligent en course, parfois bien aidé par la réussite (crevaison chanceuse à Silverstone, Safety-Car idéale à Imola) le septuple champion a rejoint Schumacher au palmarès puis l'a dépassé dans les victoires, approchant de la barre fatidique et ahurissante des 100 succès. Son triomphe sous la pluie en Turquie restera comme l'une de ses plus belles courses, un modèle de maîtrise. L'adversité a cependant manqué, et ce titre n'a pas la saveur de celui de 2014 contre Rosberg ou même de 2018 contre Vettel. Star incontestée de la F1 moderne, statut auquel il a ajouté cette année une dimension politique rare dans le sport, Hamilton n'est pas rassasié.

A côté d'un tel ogre, Valtteri Bottas fait peine. Pas facile de cohabiter avec Hamilton ! Nul ne remet en doute sa rapidité, qui lui permet de pousser Hamilton dans ses derniers retranchements en qualifications, mais son bilan en course est bien plus mitigé: départs souvent ratés, manque de mordant dans les duels, gestion des pneus plus erratique, Bottas a fait illusion au début de la saison avant de rentrer une nouvelle fois dans le rang. Et les stratégies de Mercedes n'ont pas manqué de lui rappeler son statut officieux de n°2. Bottas peut remercier les abandons de Verstappen qui lui sauvent sa place de vice-champion. La réussite n'a pas été non plus de son côté, comme lors de sa crevaison au pire moment à Silverstone ou l'erreur de pneus à Sakhir. Une course qui risque aussi de faire mal et de le fragiliser: la pige de George Russell, qui a battu le finlandais à la régulière avant les incidents, montre clairement que l'avenir de l'étoile, une fois l'ère Hamilton achevée, passera par le jeune prodige anglais.

George Russell a marqué les esprits à Sakhir, en s'adaptant si rapidement à la monoplace et en prenant aisément la mesure de Bottas en course. La victoire lui tendait les bras avant que Mercedes ne s'emmêle les pneus. Mais il a pris rendez-vous avec l'avenir.

2nd - Red Bull, l'unique challenger

1 pole - 2 victoires - 13 podiums

Encore un paradoxe. Alors que les années d'efforts commencent à porter leurs fruits, Honda annonce son retrait à l'issue de la saison 2021. En attendant de savoir ce qu'elle fera en 2022 au niveau du moteur, Red Bull peut se féliciter d'un partenariat qui monte en puissance, surtout sur la fin de la saison. Néanmoins, il n'y a eu véritablement de rapprochement par rapport à 2019, et le début de saison n'était clairement pas convaincant.

Red Bull se montre encore très "Verstappen-dépendante" et pêche par une gestion du 2e pilote compliquée. Le binome n'est pas suffisamment solide pour pouvoir titiller davantage Mercedes en course avec des stratégies plus audacieuses et perturber leur marche triomphale. On a vu à Abou Dhabi que quand c'est le cas, la donne change considérablement. Red Bull a de nombreux atouts : efficacité stratégique, équipe de mécaniciens et d'arrêt aux stands au top (rappelons nous le changement de suspension record en Hongrie), monoplace bien née, motoriste en net progrès qui n'a reçu aucune pénalité. Perez sera-t-il le chaînon manquant pour renforcer le duel contre Mercedes ?

Sans ses abandons (dont un triplé transalpin !), Max Verstappen aurait sans doute terminé vice-champion devant Bottas. Arrivé désormais à pleine maturité dans son pilotage, le néerlandais satellise Red Bull autour de lui comme Schumacher le fit avec Benetton. Ultra rapide, ultra confiant (parfois trop comme en Turquie ?), excellent gestionnaire des pneus, incisif quand il le faut, Verstappen est un très gros client dont Mercedes se méfiera sans doute l'an prochain. Ses deux victoires ont été magistrales et sans appel. Que lui manque-t-il ? Peut-être davantage d'esprit d'équipe, afin de renforcer Red Bull sans pour autant contrarier son statut de leader ?

Alex Albon a eu un peu de chance dans sa galère : la patience de Red Bull et de Helmut Marko a progressé ! Rapide mais irrégulier, le thaïlandais a vécu une année sous pression, à l'ombre du métronome Verstappen. Les écarts en qualification (17-0 !), en course et au championnat sont terribles, en dépit d'une fin de saison plus solide. Mais Red Bull n'avait plus de pilote de rechange et rappelez Gasly aurait été un désaveu de leur politique de gestion des pilotes. Albon a signé deux podiums. Il sait attaquer et peut tirer de la perf quand il réunit tous les paramètres, mais ses belles statistiques de dépassement en piste dissimulent mal ses nombreuses qualifications ratées, ses débuts de course parfois chaotiques. Pour sa défense, on peut rétorquer que le monoplace est entièrement développée autour du feeling de Verstappen, qui n'a aucune compassion et se "contrefiche" (sic) de qui était dans la 2e voiture. Albon a parfois servi de "cobaye stratégique" en course pour Red Bull, ce qui ne lui a pas facilité la tâche. Sa dernière prestation solide à Abu Dhabi va-t-elle lui permettre de sauver son baquet ? Réponse très bientôt.

3ème, la résurrection McLaren

3 meilleurs tours - 2 podiums

La bonne surprise. Il faut remonter à 2012 pour voir Woking sur le podium. Après les années de purgatoire avec Honda, McLaren a su bénéficier de la montée en puissance de Renault, de voitures bien nées pour remonter dans la hiérarchie et d'une efficacité indéniable dans la gestion de course. Seulement deux podiums, mais surtout une bonne fiabilité et une grande régularité, qui permet d'arracher dans la dernière course le top 3, alors même que la MCL35 n'était pas vraiment la 3e meilleure machine du plateau. L'effet d'Andreas Seidl aussi, excellent organisateur, et d'une paire Norris-Sainz aussi homogène et harmonieuse sur qu'en dehors de la piste. Avec le retour de Mercedes et l'arrivée de Ricciardo, McLaren peut viser grand en 2021.

Pas verni en début de saison, Carlos Sainz a frôlé la victoire à Monza en traquant Gasly. Surtout, depuis l'an passé, il monte en puissance, ce qui lui vaut d'être recruté par Ferrari. Rapide, solide en course, capable d'attaquer quand il le faut, affable et parfaitement corporate, le fils du champion du monde des rallyes termine 2020 en boulet de canon et bat sur le fil Alex Albon au championnat. Charles Leclerc est prévenu, Sainz sera sans doute un client chez Ferrari.

Lando Norris peut se satisfaire également de sa saison. Il termine moins fort que Sainz avec une première demi-saison plus avantageuse, débutée idéalement par un podium en Autriche. Le jeune espoir anglais gagne de peu son duel en qualifs (9 à 8) et peut jouir d'un grand capital sympathie.

4e, Racing Point : entre réussite et frustration

1 pole - 1 victoire - 4 podiums

Racing Point aura animé cette saison, sur la piste avec de belles performances, mais aussi en dehors avec la polémique sur sa ressemblance troublante avec Mercedes. En exploitant à fond le concept de client et de transfert de technologie, Racing Point a pu aligner une "Mercedes Rose". L'ex Force India peut-être fière de l'exercice, avec une première victoire et une présence constante aux avant-postes. Mais il y aura aussi un petit goût amer, celui d'une 3e place perdue suite à une faisceau de contrariétés : les points retirés de Styrie, les soucis de fiabilité qui coûtent cher, les erreurs stratégiques parfois grossières, les deux pilotes touchés par le Covid, etc. L'écurie peut cependant voir l'avenir avec sérénité, alors qu'elle s'apprête à entamer une nouvelle ère sous le signe du vert Aston Martin.

Sergio Perez est un cas particulier. Il accomplit sans doute sa plus belle saison, couronnée par une première victoire splendide à Sakhir et une 4e place au championnat, alors même qu'il a manqué deux courses, et pourtant, à l'heure où nous écrivons ces lignes, rien ne dit qu'il sera présent sur la grille en 2021 ! Perez a sublimé cette année les qualités qui sont les siennes depuis ses débuts en 2011 : la ténacité, la gestion des pneus, le rythme de course et le sens de l'attaque. Son éviction de Racing Point en 2021 est un crève-cœur pour Perez, qui a contribué à sauver l'écurie de la faillite en 2018 mais doit laisser place à Vettel.

Lance Stroll peut aussi se satisfaire de sa saison, qui a un peu contribué à lui enlever cette étiquette collante de "fils à papa". Certes, le départ de Perez peut difficilement masquer son statut de protégé au sein de l'écurie du paternel, mais il serait injuste de ne pas reconnaître les progrès du canadien. Une première pole et un beau début de course en Turquie, deux podiums, c'est encourageant. Néanmoins, Stroll subit un 10-4 en qualifications et fait montre encore d'une certaine irrégularité, avec des courses sans et des performances inconstantes. L'an prochain, ce sera l'épreuve de vérité face à Vettel.

Mention très honorable à Nico Hulkenberg, qui fut le remplaçant de luxe de la saison. 10 points marqués en 3 courses, dont deux où il fut appelé à la rescousse en urgence et une qu'il dut abandonner avant même le départ.

5e : Renault en net progrès

3 podiums

Certes, le losange termine au même rang qu'en 2019, mais avec le double de points (malgré 5 courses en moins) et surtout 3 podiums dans l'escarcelle ! Le plan de progression, mis à mal l'an passé, s'est remis sur de bons rails. Le début a été poussif, et Renault avait joué la prudence en ne tirant pas de plans ambitieux sur la comète. L'écurie a ensuite enclenché une dynamique et progressé, disputant même le podium du championnat jusqu'au bout grâce aux performances du V6 Renault, arrivé enfin à maturité, et une monoplace bien née au concept aéro plus efficace. Il a manqué de la régularité, avec quelques courses sans, une meilleure fiabilité et une meilleure homogénéité des pilotes pour faire la différence. L'avenir s'écrira en bleu avec la mutation sous le blason Alpine et le retour au bercail de Fernando Alonso. Renault tire sa révérence après 400 GP disputés sur un dernier exercice très encourageant pour la suite.

Daniel Ricciardo peut partir avec le sentiment du devoir accompli. Décevant l'an passé (mais pas aidé par la RS.19), l'australien a pris une autre dimension cette année, portant vers le haut l'équipe Renault. Retrouvant tout son mordant, il a fait parler son talent, notamment dans la gestion des pneus, pour signer les deux premiers podiums de Renault depuis son retour en 2016. Les tensions avec Cyril Abiteboul, consécutives à son "mariage" avec McLaren pour 2021 avant même le début de la saison, sont retombées et se sont terminées par un pari de tatouages. Professionnel, l'australien a joué le jeu jusqu'au bout.

Pour Esteban Ocon, l'année ne fut pas simple. A la difficulté de revenir en F1 après 1 an et 1/2 d'absence dans le peloton, s'est ajoutée celle de faire équipe avec une pointure comme Ricciardo. Ne le cachons pas, le français a souffert. Avec 62 points, il ramène deux fois moins d'unités que son équipier. Dominé par l'australien en qualification, un peu tendre et en manque de rythme dans la première moitié de la saison, Ocon n'a pas non plus été épargné par les ennuis mécaniques (4 abandons) et a vécu aussi dans l'ombre du succès de Pierre Gasly, avec lequel il entretient une certaine rivalité. Puis, dans la seconde moitié de la saison, avec le soutien du team, Ocon a réussi à hausser son niveau, à se rapprocher de Ricciardo en qualifications, à montrer plus d’agressivité en piste, avec en exutoire un superbe podium à Sakhir. De quoi renforcer son capital confiance, alors que l'attend l'an prochain un énorme défi face à Alonso.

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Pour résumer

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