Essai Peugeot 308 TCR : le Père Noël est une ordure
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par Cedric Pinatel

Essai Peugeot 308 TCR : le Père Noël est une ordure

Comment ruiner la découverte d'une redoutable traction de course de 350 chevaux, habituellement capable de rouler plus vite qu'une authentique GT4 en piste ? Facile : trempez-la dans la pluie pénétrante et ininterrompue du circuit de Lédedon dans des conditions tout ce qu'il y a de plus hivernales.

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Le TCR représente clairement l'une des catégories de course les plus en vue du moment. Né -entre autres- pour remplacer les autos du championnat WTCC dominé outrageusement par les Citroën C-Elysée, le TCR rassemble des berlines compactes à cinq portes disposant d'un quatre cylindres turbo de 350 chevaux et d'une transmission aux roues avant (pour 1120 kg à sec). Le règlement n'autorise que des modifications techniques limitées pour maintenir les coûts dans des proportions raisonnables, même si cela n'empêche pas les autos d'afficher un look de vrais proto de course grâce à des kits carrosserie aux voies généreuses et aux appendices aérodynamiques voyants. Conçues pour convenir autant aux vraies pilotes professionnels du championnat mondial WTCR qu'aux gentlemen drivers des quatre coins du monde, ces machines disposent généralement d'un moteur de 2,0 litres. Mais dans le cas de Peugeot, qui fait partie des marques nouvellement impliquées dans la catégorie comme Hyundai, Volkswagen, Audi, Seat, Opel, Honda et à titre privé Subaru, Alfa Romeo ou encore Renault, la nouvelle 308 TCR utilise un bloc 1,6 litres faute de quatre cylindres 2,0 litres essence disponible dans le catalogue PSA. Pour l’anecdote, notez que ce bloc identique à celui de la 308 GTI de série utilise ici des injecteurs Opel et un turbocompresseur de Mercedes-AMG A45 pour développer 350 ch et 420 Nm de couple. Sachez enfin qu'un système de BOP (Balance de Performance) régit la compétition, les organisateurs se réservant le droit d'ajuster au cas par cas les lests embarqués (ou les brides moteur), histoire d'harmoniser les performances au maximum entre chaque voiture.

L'eau à la bouche...

Pour avoir essayé précédemment deux de ses principales concurrentes (la Leon Cupra TCR et l'Audi RS3 LMS), nous savons à quel point ces berlines de course chaussées de pneus slick marchent fort en piste. Plus que leurs performances moteur, c'est leur niveau de grip colossal et leur puissance de freinage qui permettent d'abattre des chronos au-dessous des propulsions de la catégorie GT4. Et si chaque auto dispose d'un set-up différent, la Seat et l'Audi partageaient -volant en main- les mêmes traits comportementaux savoureux chez une voiture de course : engageantes de la poupe, soudées au bitume et extraordinairement tranchantes, ces machines vous procurent des sensations qu'aucune voiture de sport homologuée route ne peut approcher. Un univers très particulier qu'on retrouve dès l'installation au volant de la 308 TCR, après quelques contorsions entre les tubes de l'arceau intégral. L'ambiance intérieure vous place aux commandes d'une authentique voiture de course, avec une ergonomie de bord similaire aux autres autos de la catégorie (proche des GT4 et des GT3). Pour un premier contact, vous devez seulement connaître quelques boutons du volant et de la console centrale afin de démarrer et manoeuvrer la machine. Vous devez aussi vous accommoder de l'embrayage au pied pour passer le premier rapport de la boîte séquentielle (Sadev), mais il faudra vraiment se montrer particulièrement maladroit pour caler à la sortie des stands. Une fois passé cette manœuvre moins délicate que sur la plupart des voitures de course, vos pieds ne se servent plus que de deux pédales.

...Avant la noyade totale

Au moment de rejoindre la piste, l'essai de rêve vire tout de suite au naufrage. Je me trouve sur le circuit de Lédenon près de Nîmes, avec au lieu du soleil des cartes postales une pluie pénétrante qui tombe sur la piste depuis de longues heures. Ajoutez une température très basse sur cette piste connue pour mal évacuer l'eau, et vous obtenez la pire configuration possible pour jauger du véritable potentiel d'une voiture de course. J'imaginais que la transmission aux roues avant constituerait un avantage, dans ces conditions, par rapport à une puissante propulsion. Erreur : même équipée de pneus pluie de course (des Michelin), le train avant (dépourvu du moindre système d'antipatinage électronique) ne permet tout simplement pas de faire passer la puissance sur cette patinoire. Pire, il suffit d'une pression un peu trop appuyée sur la pédale de frein (sans ABS) pour bloquer les roues et tirer tout droit lamentablement avant chaque épingle. Me voilà réduit, après un demi-tête à queue ridicule au deuxième virage suite à un levier de pied en courbe (le train arrière demeure volontaire, surtout en pneus froids !), à devoir caresser à peine la pédale de droite à chaque sortie de virage (et celle de gauche avant chaque virage suivant). Deuxième, troisième et quatrième vitesses s'appellent bien au-dessous de la zone rouge pour réduire au maximum le patinage du train avant. Impossible de freiner tard (et à fond) sous peine de finir tanké dans le bac à gravier d'en face.

Ecoeuré par ma frustration, je rentre au stand pour laisser mon baquet à Aurélien Comte, le talentueux et jeune pilote d'usine Peugeot engagé en WTCR avec la 308. Je monte à sa droite pour voir ce que donne, dans ces conditions terribles, la voiture conduite par un vrai pilote. Forcément, le rythme augmente beaucoup. Aurélien brutalise la voiture avant chaque courbe, la jetant violemment en virage et jouant au maximum avec son équilibre. Mais même avec un professionnel de son calibre au cerceau le train avant rend les armes très vite, se bloque à chaque gros freinage et patine librement à la moindre ré-accélération. Dans ce champs de bataille "zero grip", le train avant est un facteur limitant particulièrement castrateur. Je me souviens des autres TCR conduites dans de bien meilleures conditions, et j'imagine bien que la 308 TCR me ferait transpirer de bonheur sur un toboggan de Lédenon au sec. Ecraser les freins de toutes ses forces, passer les courbes à haute vitesse, sentir l'autobloquant tracter l'auto vigoureusement en sortie sans pertes de motricité, jouer avec la violente boîte séquentielle aux passages de rapport éclair...autant de plaisirs typiques d'une bonne TCR interdits par cette terrible pluie d'hiver. Les conditions de piste s'amélioreront un peu en fin d'après-midi, mais un vilain boulon desserré immobilisera la voiture trop longtemps pour en reprendre le volant. Quand ça veut pas...

Le principal enseignement de cet essai restera donc qu'une TCR se montre mille fois moins intéressante à piloter sous la pluie que sur le sec. Quelques jours plus tard, j'ai roulé en passager dans une Audi R8 LMS GT3 sur une piste d'Ascari à peine moins gorgée d'eau. Visiblement moins gênée par la pluie, l'auto gardait plus de train avant et ne souffrait pas de gros problèmes de motricité malgré ses près de 600 ch aux roues arrière. Certes, on parle ici d'une GT de course presque quatre fois plus chère, nettement plus chargée en appui aérodynamique et équipée de pneus pluie encore plus performants. Car la 308 TCR ne coûte que 109 000€ HT livrée avec sa coûteuse boîte séquentielle Sadev. A titre de comparaison, une Leon TCR équipée d'une boîte similaire coûte 115 000€ HT et une RS3 LMS TCR, 124 000€. Ces deux machines proposent bien une boîte DSG 25 000€ moins cher, mais n'espérez pas prendre un pied identique avec sa lenteur de fonctionnement.

Les bons résultats d'Aurélien Comte en WTCR avec l'équipe DG Sport Competition prouvent la valeur de cette 308 TCR, éligible par ailleurs dans un grand nombre de championnats et courses dans le monde (et livrable avec l'ABS interdit seulement dans les séries TCR). Plus performante que la 308 Racing Cup de la coupe monomarque Peugeot, capable de rouler plus vite qu'une vraie GT4 de course (et pas si loin d'une Porsche 911 GT3 Cup), une TCR coûte bien moins cher que ces dernières à faire rouler (par exemple, le moteur de la 308 tient 5000 km et son remplacement revient beaucoup moins cher que l'entretien d'un flat-six de 911 Cup). Compte tenu du rythme en piste, elle représentera aussi l'arme fatale en track-days même au milieu des voitures de sport les plus puissantes du monde. Il faudra seulement surveiller la météo pour s'amuser avec...

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Pour résumer

Comment ruiner la découverte d'une redoutable traction de course de 350 chevaux, habituellement capable de rouler plus vite qu'une authentique GT4 en piste ? Facile : trempez-la dans la pluie pénétrante et ininterrompue du circuit de Lédedon dans des conditions tout ce qu'il y a de plus hivernales.

Cedric Pinatel
Rédacteur
Cedric Pinatel

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