Le délit d’homicide routier officiellement adopté. Ce que cela change.

Hier mardi 1er juillet 2025, le Sénat a voté la création du délit d’homicide routier. Le parcours parlementaire est donc fini. Mais concrètement, que change cette nouvelle loi ? Eh bien, pas grand-chose sur le papier.

Le délit d’homicide routier vient compléter le délit d’homicide involontaire actuel. Cette dernière qualification est utilisée lors d’un accident de la route ayant causé un ou plusieurs décès.

« Un grand pas de franchi pour les victimes : le parlement adopte définitivement la création d’un délit d’homicide routier. Désormais, les responsables d’accidents mortels avec une circonstance aggravante comme la consommation de drogues ou d’alcool seront poursuivis pour « homicide routier » et non plus pour « homicide involontaire » », s’est félicité Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, sur X.

Pourquoi le député Eric Pauget (Les Républicains) portait ce projet de loi ? En fait, pour les victimes et leurs proches, la qualification d’homicide involontaire est une violence supplémentaire quand le responsable de l’accident était par exemple sous l’empire de l’alcool ou de la drogue, ou a pris volontairement des risques en roulant à tombeau ouvert en ville.

Ainsi, la loi jusqu’à présent mettait sur un pied d’égalité un auteur d’accident suite à un incident mécanique et celui ayant consommé de la cocaïne ou de l’alcool avant de prendre le volant.

Et concrètement ?

Sauf qu’à bien y regarder, cette qualification d’homicide routier n’apporte pas grand-chose de concret. En effet, c’est bel et bien un nouveau délit. Il pourra être requis contre les responsables d’accidents mortels avec au moins une circonstance aggravante. Ces circonstances sont par exemple la conduite sans permis, l’excès de vitesse égal ou supérieur à 30 km/h, l’état d’ivresse ou la consommation de stupéfiants.

Mais on compte également le délit de fuite, l’utilisation d’écouteurs ou de téléphone à la main ou encore la participation à un rodéo urbain. Autant dire que toute imprudence volontaire peut vous faire basculer d’homicide involontaire à homicide routier. Soit.

Les peines encourues sont alors une peine d’emprisonnement de sept ans et de 100 000 euros d’amende. La peine pourra être alourdie à 10 ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende si on cumule au moins deux circonstances aggravantes. En revanche, plus de trace de peine minimale (alias peine plancher) qui était dans la première mouture de la loi.

Le souci, c’est que ces peines encourues sont les mêmes peines que pour le délit d’homicide involontaire. Ne reste donc plus que la qualification pour apaiser les victimes. Un premier pas insuffisant.

Prochaine étape : Une vraie distinction et une individualisation des victimes ?

Lors d’un accident routier, l’auteur est jugé « pour l’ensemble de son oeuvre ». Sauf que les victimes sont individuelles et ne vivent pas l’accident de la même manière. Plusieurs affaires ont eu lieu par le passé, avec plus ou moins de médiatisation. Il y a évidemment l’affaire Palmade. L’ex-humoriste a causé un accident sous l’empire de la drogue. Il avait pris volontairement le volant et blessé très gravement trois personnes et provoqué une fausse-couche.

Pour autant, il n’a été condamné qu’à 5 ans dont 2 fermes. Une peine jugée trop clémente par de nombreuses parties et qui est, hélas, souvent le lot des victimes de la route. Le code pénal prévoit pourtant quinze (15) ans de prison pour des violences ayant entrainé la mort sans intention de la donner. On est typiquement dans ce cas-là quand on sort bourré, sans permis, drogué, ou autre avec un véhicule.

Dès lors, il faudrait sans doute une vraie distinction entre l’homicide involontaire (par imprudence, etc.) et l’homicide routier. A noter que certains accidents sont requalifiés en meurtre (ou homicide volontaire) quand le chauffard vise délibérément sa victime. Il faudrait, mais c’est une remarque plus générale, individualiser les victimes et cumuler les peines pour chaque victime.

Non, il n’y a pas de fatalité aux accidents de la route

Mais, il semble qu’il subsiste une certaine mansuétude pour les chauffards. Sans doute des années de chiffres de la sécurité routière à plus de 10 000 morts par an, vécus comme une fatalité.

Pour rappel, sur les un peu moins de 3 500 décès sur la route en France, 1/3 n’étaient pas responsables de l’accident. Et parmi les causes, la cause mécanique ou un animal sauvage sont très rarement citées. L’alcool, la drogue, les imprudences sont très majoritaires. Deux tiers des accidents corporels impliquent au moins un facteur aggravant de la nouvelle loi.

(4 commentaires)

  1. Je ne suis pas sûr que le renforcement des sanctions à tout va soit un bien …
    Mais, si on veut aller par là, il faut généraliser cela. Tout homicide involontaire avec un manquement factuel aux règles de sécurité élémentaires doivent être mises dans le même cas.
    – Les accidents du travail avec manquement aux règles de sécurité
    – Les accidents domestiques dans un logement insalubre
    – Les couteaux de cuisine avec une personne psychologiquement faible
    -…

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