Jusque là, rien ne laissait présager de ce qui allait suivre. Les premiers hectomètres sont absorbés sans heurts dans une douceur fallacieuse. Si ce n’est son physique particulier, elle se fondrait facilement dans la circulation besogneuse des hauteurs cannoises. Et puis, ce sont les premières échauffourés. Le rond-point s’offre à nous comme une pièce jaune à Bernadette. Le décollage est viril, le quart de cercle est effacé dans un déhanchement d’une progressivité étonnante. La sortie du "tourne en rond" se vise d’une simple rotation du volant, envoyant l’arrière train dans un trémoussement inverse. Saggie, Sagaris pour les non-intimes, est une danseuse de première. Le ballet se poursuit à l’envie au gré de la topographie des environs de Gourdon. Les premiers enchainements sont bordés de murs inquisiteurs qui marqueraient à tout jamais les excès d’optimisme ou les erreurs de jugement du maître à bord. Ils n’auront pas cet honneur. Seulement celui de répercuter la musicalité "damnatrice" d’un Speed 6 déjà échauffé.
L’horizon se libère, le couloir de bitûme se fait plus large et Saggie s’emporte. Ses hurlements strient le bitûme de virgules de gomme et le contre-braquage fait son entrée dans le registre du chef d’orchestre. Au volant, l’homme fait corps, son regard s’aiguise, ses gestes se font plus rapides, les paroles sont absentes depuis déjà longtemps. Les crissements se mêlent aux cris de rage des échappements, emportant le pilote dans un paroxysme fusionnel d’une ampleur rare. On approche de la transe.
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