Vincigate : les concessionnaires d'autoroute marchent sur des oeufs
par Thibaut Emme

Vincigate : les concessionnaires d'autoroute marchent sur des oeufs

Et si Vinci avait déclenché quelque chose de plus grave qu'une simple grogne en réclamant le paiement du péage à la lecture des plaques ? Cet imbroglio remet sur le devant de la scène la re-nationalisation des autoroutes et pourrait vite partir en quenouille.

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Après plusieurs épisodes de violences qui ont vu plusieurs péages incendiés et des opérations "barrières levées" se dérouler, Vinci a tenté de bomber le torse lundi 17 décembre 2018. En effet, l'empire BTP-parking-autoroute a annoncé vouloir faire payer aux automobilistes passés durant ces manifestations sans bourse délier, le prix de l'octroi, pardon, du péage.

Pour cela, Vinci s'appuie sur une loi de 2013 modifiant le code de la route (article R330-2) l'autorisant à identifier les auteurs d'infraction. Ainsi, certains salariés sont assermentés pour avoir accès au SIV et demander par la suite les poursuites pénales. Quand on "force" un péage, on risque une amende de 2e classe soit 35 euros (minorée à 22 euros si paiement dans les 15 jours). Cette disposition concerne, théoriquement, les vrais fraudeurs, ceux qui collent le véhicule de devant pour passer la barrière.

Erreur de communication, un cas d'école

Mais, ici, la plupart des gens sont passés "de bonne foi" (ou avec un peu d'opportunisme). Magnanime, Vinci indiquait ne pas vouloir lancer de poursuite pour ces gens, mais simplement récupérer le montant du péage. Tollé général, dans le public comme sur les bancs de l'assemblée nationale. Vinci aura beau arguer qu'ils ont fait cela suite à la demande d'automobilistes responsables les ayant contacté pour savoir comment se mettre en règle, personne ne croit à leur carabistouilles.

En "off", il se dit surtout que ce sont des automobilistes avec le badge de péage, qui ont donc été débités pour leur passage qui ont porté réclamation auprès de Vinci (entre autres), trouvant anormal d'avoir payé quand les autres ont pu passer "gratis". Et surtout d'avoir dû payer pour un service non rendu.

Hier, 18/12, rétropédalage en règle de la part de Vinci qui tente un saupoudrage de poudre de perlimpinpin pour endormir les foules. Mais, c'est trop tard, la machine médiatique est lancée. Un "bad buzz" comme on dit pour faire branchouille. Déjà, plusieurs avocats et spécialistes du droit ont pointé du doigt l'idiotie de Vinci de vouloir accéder au SIV (système d'immatriculation des véhicules) sans déclencher de plainte. C'est contraire à la loi selon eux. De plus, le service n'étant pas assuré, il serait "facile" selon ces mêmes conseillers de justifier d'un péage gratuit ou pour le moins fortement réduit.

Pas rentable

En outre, pour réclamer le paiement du péage (10 ou 20 euros maximum), Vinci va devoir débourser beaucoup d'argent. Surtout si les impétrants font la sourde oreille comme leur conseillent les avocats. A ce moment, Vinci devra passer par un recommandé, augmentant un peu plus la facture. Récupérer les quelques péages non perçus va donc leur coûter plus cher que ce que cela rapportera. Et niveau image, c'est bon, Vinci qui n'avait déjà pas une super image auprès du public vient d'enfoncer le minimum possible en terme de popularité.

"Pouce pouce ! On dirait qu'on avait rien dit" dit en substance Vinci. Dans un communiqué officiel, la société déclare que l'on a mal compris. Revoilà l'excuse du "vous êtes trop BIIIIP pour comprendre" que l'on entend un peu trop souvent en ce moment. Il n'empêche, même des députés de la majorité, même le gouvernement trouvaient Vinci très (trop) gonflé de réclamer son dû. Légalement, chez Vinci, ils étaient sans doute en droit de le faire. Après tout, ce n'est pas parce qu'un magasin a été vandalisé qu'on a le droit de se servir. Mais, moralement et légitimement c'est autre chose.

Vinci aurait sans doute dû faire le dos rond

Surtout, Vinci s'est peint une cible sur son front (virtuel). Dans la nuit du 18 au 19 décembre, "Un bâtiment de Vinci à Bessan (Hérault), à 20 km à l'Est de Béziers, a été incendié (...), a-t-on appris auprès des pompiers. Des gilets jaunes ont revendiqué cette action auprès d'un correspondant de l'AFP. Ce bâtiment, situé au niveau du péage et qui servait de local technique et de réfectoire, avait déjà été incendié au cours du week-end".

D'autres installations Vinci (mais pas que eux) ont connu des dégradations importantes ces derniers jours. La réaction de Vinci est aussi à l'origine d'une nouvelle revendication des "gilets jaunes", la re-nationalisation des autoroutes concédées. Vinci a ouvert la boîte de Pandore, reste à voir ce qu'il en sortira. D'autant plus que les hausses des péages arrivent et que cela va se rajouter à la grogne. En attendant, cela crame au niveau des péages.

Illustration : Vinci

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Pour résumer

Et si Vinci avait déclenché quelque chose de plus grave qu'une simple grogne en réclamant le paiement du péage à la lecture des plaques ? Cet imbroglio remet sur le devant de la scène la re-nationalisation des autoroutes et pourrait vite partir en quenouille.

Thibaut Emme
Rédacteur
Thibaut Emme

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