A Termoli, les moteurs se cachent pour mourir

termoli
FIAT GM POWERTRAIN ITALIA SRL INDUSTRIA AUTOMOBILISTICA TERMOLI

C’est un symbole de l’industrie automobile italienne qui est en train de mourir à petit feu : l’usine de Termoli, antre de nombreux moteurs italiens emblématiques, voit ses lignes de production de moteurs s’éteindre.

Le désengagement de l’Italie

« Nous assistons aux funérailles du moteur FIRE », déclare le syndicat FIM CISL, déplorant que « C’est tout un pan de l’histoire industrielle italienne qui vacille, dans l’indifférence de Stellantis et le silence des institutions ». En effet, le décalage semble de plus en plus béant entre les déclarations d’intention, notamment le Plan Italie présenté fin 2024 afin de rassurer les autorités italiennes sur l’emploi et la production en Italie, et la réalité des actes. N’oublions pas que des modèles du groupe marchent plutôt bien, comme le Junior d’Alfa Romeo et la nouvelle Grande Panda. Toutefois, Stellantis assemble ces derniers hors d’Italie et n’adoptent pas de motorisations issues de FCA. De l’autre côté, alors que la concurrence chinoise inquiète, Stellantis développe l’implantation de Leapmotor, qui pourrait prendre des parts de marché sur l’EV à d’autres marques du groupe…

En pleine tempête

Termoli incarne à sa manière les difficultés,  les errements de choix stratégiques faits sous FCA puis Stellantis. Le site devait initialement se convertir en usine de batteries avec le projet ACC, avant que tout ne tombe à l’eau en raison du revirement brutal du marché EV, de l’effondrement de la demande (notamment pour la 500) et de coûts jugés trop élevés par Stellantis.

De surcroit, Termoli a également cristallisé l’an dernier les crispations entre le ministre souverainiste de l’industrie, Adolfo Urso, et la direction Tavarès, avec à la clé le retrait d’un financement public majeur à hauteur de plusieurs centaines de millions d’euros pour le site, en représailles à la désertification par le groupe du tissu industriel transalpin.

Un site emblématique du savoir-faire transalpin

Termoli a produit à partir de 1985 la fameuse gamme de moteurs FIRE (Fully Integrated Robotised Engine) 8 et 16 soupapes, qui ont équipé pléthore de modèles FIAT, ALFA ROMEO, LANCIA et même JEEP. Fiables, robustes, polyvalents, performants, les moteurs FIRE ont grandement contribué au succès de nombreux modèles italiens.

Leur simplicité de conception, conjuguée à une qualité d’usinage de haut niveau, a fait du FIRE l’un des meilleurs moteurs de l’histoire. L’usine a produit la version 8 soupapes à plus de 23 millions d’exemplaires jusqu’en 2020. C’est désormais la lignée des moteurs 16 soupapes que Stellantis doit arrêter dans le courant de l’été.

En Europe, c’est la nouvelle génération du moteur d’origine PSA « Puetech » (bien que le nom, trop entaché, ait été banni officiellement), normalement débarrassé de ses tares initiales, qui se généralise au sein du groupe. Paradoxalement, le Firefly de FIAT continue d’être abondamment utilisé pour l’Amérique du Sud (sur la 208 par exemple). En effet, les règles antipollution y sont bien moins contraignantes.

La 500 hybride, une « petite » bouée de sauvetage

L’avenir est sombre à Termoli. La production des moteurs GSE Firefly pour le Tonale et la Panda hybride se poursuit, mais la demande n’est pas suffisante. Une petite lueur d’espoir doit venir avec la 500 hybride qui devrait recevoir le bloc 1.0 GSE et la production des boîtes e-Dct. Hélas, les besoins de production ne devraient garantir que 300 emplois, contre plus de 3500 sur le site il y a encore peu.

Pour les autres moteurs, même son de cloche : Alfa a stoppé la commercialisation des Giulia et STelvio équipés du 2.0 turbo GME et les variantes QV V6 biturbo 2.9. Le V6 Nettuno de Maserati est produit en très faible quantité, car les ventes du Trident sont au point mort, et rien n’est encore acté, concernant les prochaines Stelvio et Giulia, sur la présence d’un nouveau V6.

la FIM CISL déplore la situation : « Aucun avenir concret, aucune garantie pour les travailleurs », assène Fabrizio Boschini, secrétaire national. Il juge la gestion de Stellantis « aveugle, sans vision », fondée sur « le renoncement plutôt que la reconstruction ». Pendant ce temps, les lignes se vident de leur équipement et des camions embarquent ce matériel loin de Termoli. Signe des temps, le site pourrait se faire racheter par un groupe chinois, puisque Dongfeng, ancien partenaire de PSA, s’est manifesté auprès des autorités italiennes pour reprendre un site italien en difficulté…

(12 commentaires)

  1. Oui, j’avoue que je ne comprends pas trop la politique de Stellantis….
    Est-ce celle d’un canard sans tête !?
    Chronologiquement, Stellantis a hérité d’une situation de 2020… Ou les problèmes connus depuis 5 ans étaient peu ou pas connus.
    Pour les hdG Stellantis…La politique trop rapide du tout VE est une erreur… CF Porsche pour commencer… Il faut en faire ! Cela reste l’avenir à long terme, mais ce n’est que pour viser que 1/4 des PdM dans un premier temps.
    J’espère qu’ils nommeront rapidement un CEO pour redonner un cap avec 1/4 de VE et 3/4 de VT hybrides.

  2. Ben l’Italie exporte beaucoup grâce à un réseau de PME familiales et une diaspora présente partout de la France aux USA … par contre les grandes fortunes italiennes vendent leurs fleurons pour le plus grand plaisir des groupes français ou allemands.

    Nos constructeurs nationaux investissent en Espagne et pas en Italie … pourtant deux pays où la main d’œuvre y est moins chère qu’en France. Le soucis premier de l’Italie depuis de nombreuses années c’est que l’économie souterraine joue un rôle important dans la fuite des grands groupes sur son sol. Aucune étude n’est faite sur cette économie souterraine qui coûte des points de croissance au pays et dont l’UE semble très conciliante.
    Donc il vaut mieux investir en Espagne ou en Turquie. Le gouvernement actuel profite des réformes lancées avant son arrivée mais a arrêté la lutte contre cette économie souterraine.

    1. « Nos constructeurs nationaux investissent en Espagne et pas en Italie »
      Stellantis n’est pas français. La DS N°8 est produite à Melfi, ce sera aussi le cas de la prochaine DS N°7.

      1. Stellantis est moitié français. PSA ne croit pas dans l’industrie italienne de Fiat … Peugeot et Citroën produisent plus en Espagne qu’en Italie. Feu Agnelli savait parlé à l’économie parallèle italienne pour préserver son outil de production… pas ses héritiers et sûrement pas Carlos … Fiat est quand même parti produire en Serbie, c’est dire!

        1. « Stellantis est moitié français. »
          Un tiers. Les deux autres sont italiens et américains.
          L’ex-PSA n’a fait que privilégier ses usines… et pour l’instant ça n’a pas réussi.
          Peugeot et Citroën produisent plus en Espagne qu’en Italie parce que leurs usines sont là-bas.
          « Fiat est quand même parti produire en Serbie, c’est dire! »
          Qui en a pris la décision ? Tavares vraisemblablement. Pour rappel, elle devait être produite à Pomigliano d’Arco en remplacement de l’actuelle. D’ailleurs, la prochaine Pandina le sera.

    2. « par contre les grandes fortunes italiennes vendent leurs fleurons pour le plus grand plaisir des groupes français ou allemands. »
      Actuellement c’est l’inverse qui semble se produire. TIM – ex-Telecom Italia – est en train de se débarrasser de Bolloré tout en voyant Poste Italiane devenir son actionnaire majoritaire. Pirelli devrait vraisemblablement se débarrasser de son actionnaire chinois. Entre autres.

  3. « Le V6 Nettuno de Maserati est produit en très faible quantité, car les ventes du Trident sont au point mort, et rien n’est encore acté, concernant les prochaines Stelvio et Giulia, sur la présence d’un nouveau V6. »
    Des rumeurs parleraient du six cylindres en ligne Hurricane.

  4. ça me fait songer au textile en France il y a 40 ans . Ceux qui arriveront à tenir seront peut-être gagnants après demain !? Ce sont les maîtres du monde qui décident. J’ai écouté 1 ministre français, à propos de l’auto électrique qui m’a fait, un temps, croire que j’étais devant une projection de film prochainement primé à Cannes. L’Italie sur le plan industriel dans ses accords internationaux joue une meilleure carte politique que nous autres. Le moteur thermique en Italie ne mourra pas comme ça . C’est mon idée.

  5. Oui… Le problème est global et pas spécifiquement « Stellantis »
    Certes sous l’ère Stellantis … Peu de modèles ont été présentés (mais ça va venir !)… et globalement, ils sont des succès… … MAIS Stellantis n’a QUE 4 années.
    Qu’a étudié l’ex. FCA qui est sortie avec succès depuis 5 années ????
    Le Tonale… Oui, on voit le résultat !
    Fiat est débordé par les commandes de la Grande Panda… et ce n’est pas une ex.FCA…

    Après cela n’efface pas les problèmes de fiabilité (la plupart avant 2023) et les marges trop élevées voulues par Tavares, qui ne compense plus du tout la baisse des volumes qui sont tombés beaucoup trop bas !

    Donc oui, Stellantis passe un mauvais moment… Mais les problèmes ne sont pas tous internes… Loin de là !

  6. « Le Tonale… Oui, on voit le résultat !
    Fiat est débordé par les commandes de la Grande Panda… et ce n’est pas une ex.FCA… »
    Pour rappel, Imparato avait fait reporter l lancement du Tonale « pour améliorer la qualité ».
    La Grande Panda est l’arbre qui cache la forêt. La 600 ne se vends pas, idem l’Ypsilon. Seule la Junior semble faire illusion. Ne pas oublier qu’elles sont équipées du moteur PureTech.

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