Pourquoi Petit Le Mans n’est pas une course comme les autres

Photo : Porsche

Petit Le Mans : le lieu…

Petit Le Mans se dispute chaque année, en octobre sur le circuit de Road Atlanta. Et de nouveau, pendant 10 heures, ce week-end, pour une 28e édition qui s’annonce serrée. Construit en six mois à la fin des années 1960, ce tracé fut l’un des hauts-lieux du bref mais tonitruant championnat CanAm. Le décor ? Un terrain ondulé et boisé à 80 km au nord d’Atlanta.

Un peu tombé dans l’oubli, le tracé fut racheté par Don Panoz, patron d’une importante entreprise pharmaceutique. L’homme était aussi un mordu d’endurance, donnant même naissance à de sonores et impressionnantes voitures à gros V8 antérieur. En 1998, il lança une épreuve hommage aux 24 Heures du Mans, logiquement nommée Petit Le Mans, attirant un plateau de qualité grâce à des invitations dans la Sarthe pour les vainqueurs. 

Depuis, chaque automne, l’endurance américaine clôt sa saison sous les feuilles rougissantes et avec des températures clémentes. La course se termine de nuit, mais à une heure raisonnable pour les 150 000 spectateurs franchissant les portes du circuit. Et elle bénéficie aujourd’hui de l’excellent plateau offert par l’IMSA, avec Porsche, Acura, Cadillac, BMW et Lamborghini engagés dans la catégorie reine GTP.

Conformément à la tradition américaine, pas de stands en dur, mais un muret laissant observer le travail les mécanos. L’infield, c’est-à-dire la partie centrale du circuit est ouverte à tous. Et l’on campe volontiers près de la piste. Le format « 10 heures » permet de suivre l’épreuve dans son intégralité. Et l’on rencontre facilement les pilotes lors de sessions « autographes ».

Petit Le Mans : les personnages…

Ils sont nombreux et le trafic est une clé de l’épreuve. Ce week-end, le nombre d’engagés s’élève à 53. Si l’on rapporte ce chiffre à la longueur du circuit (4,088 km), cela donne une densité d’une voiture tous les 77 mètres. On peut comparer ce chiffre avec quelques autres épreuves majeures dans la paysage de l’endurance. 

  • Petit Le Mans : 1 voiture tous les 77 mètres
  • 24 Heures de Spa : 1 voiture pour 93 mètres
  • 24 Heures de Daytona : 1 voiture tous les 94 mètres
  • 24 Heures du Nürburgring : 1 voiture tous les 179 mètres
  • 24 Heures du Mans : 1 voiture tous les 220 mètres

De surcroît, le circuit de Road Atlanta ne dispose que de deux grosses zones de freinage, mais aussi d’une longue section nommée « The Esses », avec sept changements de direction, en descente puis en montée, concentrés en une dizaine de secondes. 

Lorsqu’un paquet de GTD se présente, mélangé avec des GTP et un soupçon de LMP2, cet étroit serpentin peut vite se transformer en Boulevard Périphérique à la sauce géorgienne. Appels de phares et mauvaise humeur inclus. 

Parfois, cela se passe bien. L’an dernier, la course connut une période de cinq heures consécutives d’action sans neutralisation. Parfois, cela se passe moins bien. Et l’on rentre alors dans le cercle infernal : un incident survient, on regroupe le peloton, nouveau départ en pneus froids, nouvel incident… 

Le cas le plus emblématique est celui de l’édition 2015, disputée sous une pluie battante et interrompue à de multiples reprises. Le chahut fut tel qu’une voiture de la « petite » catégorie GT s’imposa au général. Profitant de l’excellente tenue de ses Michelin dans ces conditions, Nick Tandy imposa sa Porsche 911 RSR à la barbe des plus véloces (et assez affreux) Daytona Prototypes… 

Petit Le Mans : le temps… 

Saviez-vous que les Américains n’utilisent jamais l’expression money time ? Elle a été inventée en France, quelque part dans les années 1980, par le commentateur de Canal+ George Eddy. Il décrivit ainsi les dernière secondes – souvent décisives – des rencontres de basket de la NBA. 

Petit Le Mans nous fait dire que nos amis d’Outre-Atlantique feraient bien de s’en servir. Car la course américaine se joue très souvent dans les dernières minutes, alors que la nuit est tombée sur la campagne géorgienne et que les phares déchirent l’obscurité. 

Quelques exemples tirés des 27 éditions précédentes ? En 1999, la BMW V12 LMR, pilotée par Jorg Müller, était sortie de la route à cinq tours de l’arrivée alors qu’elle occupait largement la tête. Elle abandonna la victoire à une Panoz menée par Andy Wallace, Eric Bernard et David Brabham. 

En 2020, une lutte pour la victoire dégénéra dans les dernières minutes. L’Acura de Ricky Taylor et la Cadillac de Pipo Derani s’accrochèrent en vue du damier. La rixe permit à l’Acura de Renger van der Zande de s’imposer… 

Surtout que Petit Le Mans est traditionnellement la dernière manche du championnat. Il s’agit donc du money time du money time. Et les pilotes en font parfois un peu trop dans un tel environnement. 

« Il faut survivre jusqu’au dernier restart, explique Mathieu Jaminet, possible champion ce week-end, à nos confrères de The RaceEtant donné que la course se termine à 10 heures du soir, vous réglez votre voiture pour qu’elle soit performante de nuit. Notre Porsche 963 tend à bien fonctionner lorsque les températures descendent. Nous espérons que cela va nous aider ce week-end ».  

Préparez le café, cela vaudra le coup de rester réveillé.  

La 28e édition du Petit Le Mans est disputée sur la chaîne Automoto et sur le canal Youtube de l’IMSA. Le départ est donné ce samedi à 18h10 heure française pour une arrivée prévue à 04h10. 

Michelin en IMSA : un contrat jusqu’à 2035

Depuis 2018, le circuit de Road Atlanta porte aussi le nom de Michelin Raceway. Bibendum a donc profité de cette dernière étape du championnat IMSA pour annoncer la prolongation du contrat de partenariat avec la discipline. Le manufacturier fournira les pneumatiques des concurrents jusqu’en 2035.

« On dit souvent que les Américains sont court-termistes, explique Matthieu Bonardel, directeur de Michelin Motorsport, mais cela ne dérange absolument pas l’IMSA de s’engager sur une période de 10 ans, voire plus. Le WEC, qui est lié à la FIA, fonctionne avec des contrats plus courts. L’esprit est différent, il s’agit d’offrir une chance à l’ensemble des fournisseurs possibles de participer aux appels d’offre. Dans le championnat du monde, notre engagement court jusqu’en 2029 ». 

La prolongation en IMSA est-elle un prélude à un statut quo en mondial ? « La logique d’avoir une plateforme globale prévaut et c’est l’une des recettes du succès de ces championnats, poursuit Matthieu Bonardel. Etre présent en IMSA donc un avantage. Mais ce n’est pas une garantie. Les GT3 qui courent en IMSA sont en Michelin. En WEC, elles sont aujourd’hui équipées par une marque concurrente ». 

A lire : Porsche jette l’éponge en championnat du monde d’endurance

Un commentaire

  1.  » Et elle bénéficie aujourd’hui de l’excellent plateau offert par l’IMSA, avec Porsche, Acura, Cadillac, BMW et Lamborghini engagés dans la catégorie reine GTP.  »

    Aie coup dure pour Aston lol

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