Les villes de Paris et Bruxelles viennent de plaider la semaine dernière devant le Tribunal de l’Union européenne à Luxembourg en vue de faire annuler un règlement européen sur les normes d’émissions de gaz polluants concernant les véhicules. Les deux cités l’estiment beaucoup trop laxiste.
Ironie de l’histoire. Cette démarche intervient au moment même où la France vient d’être renvoyée devant la Cour de justice de l’UE pour le non-respect des limites de rejets de dioxyde d’azote, émis par les moteurs diesel, et ce, à la demande de la Commission européenne.
Anne Hidalgo en guerre contre un « permis de polluer »
Anne Hidalgo, maire de la capitale française, est venue en personne à la barre pour témoigner contre ce qu’elle estime être un « permis de polluer » accordé par l’UE.
Ainsi que Bruxelles et Madrid (non représentée à l’audience), l’élue demande l’annulation pure et simple du règlement incriminé.
Elle estime en effet que les mesures prises par la Mairie de Paris en vue d’interdire l’entrée de véhicules polluants dans la capitale de l’Hexagone « sont atténuées dans leur efficacité ».
Anne Hidalgo s’insurge que la Commission elle-même permette aux constructeurs de « polluer plus longtemps puisqu’il leur est donné une possibilité de multiplier par 2,1 leur capacité de pollution ».
La marge de tolérance pointée du doigt
Pour rappel, depuis septembre 2017, les constructeurs bénéficient d’une marge de tolérance de 110% pour les émissions d’oxyde d’azote de leurs nouveaux modèles mis en circulation (date butoir fixée en 2019 pour les nouvelles voitures). Admettant désormais un taux deux fois plus important que le seuil de 80mg/km stipulé jusque là par la législation européenne pour les tests en laboratoire.
Une décision prise par l’Union européenne alors que l’industrie représente 12 millions d’emplois dans l’UE. Selon les législateurs, la marge était justifiée par la prise en compte des aléas de la conduite sur route.
« L’accord réduit significativement les écarts observés entre les tests en laboratoire et les mesures en condition réelle, qui pouvaient être jusqu’à quatre fois supérieurs », soulignait alors la Commission, alors que des différences sont observées depuis 2010.
Les chiffres présentés par l’UE fournis par un comité technique avaient soulevé la colère des Verts et d’associations de protection de l’environnement.
« Les citoyens vont se demander pourquoi leurs gouvernements préfèrent aider les constructeurs automobiles qui trichent lors des tests plutôt que de leur fournir un air propre à respirer », s’était alors indigné Greg Archer, de l’ONG Transport & Environment, basée à Bruxelles et Londres.
Les eurodéputés libéraux et Verts étaient montés au créneau, parlant de « coup monté » plaçant « une fois de plus les intérêts des constructeurs automobiles devant la santé des gens ».
Bataille juridique
Jean-François Brakeland, représentant de la Commission, a déclaré quant à lui devant le Tribunal que la « base juridique » du règlement attaqué ne permettait pas d’interdire toutes les mesures voulues par les villes de Paris, Bruxelles et Madrid pour lutter contre la pollution.
« Une collectivité territoriale que ce soit Paris, Madrid ou Bruxelles n’aurait pas le droit d’interdire la circulation de véhicules qui respectent la dernière norme européenne », a rétorqué quant à lui l’avocat de la Mairie de Paris, Me Jérémie Assous. Laissant ainsi entendre que le texte européen allait empêcher ces villes de promulguer des réglementations plus strictes, ce à quoi s’opposent leurs élus.
De source judiciaire, on indique que le verdict du Tribunal de l’Union européenne devrait tomber d’ici à la fin de cette année.
Réduction graduelle de la tolérance
Reste qu’ à partir de janvier 2020, la marge de tolérance pour les émissions d’oxyde d’azote sera ramenée de 110% à 1,5 fois (50%) pour tous les nouveaux modèles – un an plus tard pour les nouvelles voitures – et ce, de façon permanente, pour prendre en compte les contraintes de la conduite réelle.
La Commission prévoit de le rabaisser à 1 et donc de ramener les deux seuils à 80 mg/km « dès que possible et au plus tard d’ici 2023 ».
Sources : AFP, Commission européenne
Illustration : Ville de Paris
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15 Commentaires sur "Hidalgo contre le laxisme de Bruxelles sur la pollution"
C’est là où la réponse de la justice va être intéressante, elle va nous permettre de savoir si le règlement précédent imposait bien le respect des normes dans toutes les conditions ou seulement selon la procédure d’essai définie.
J’espère au moins que la plainte a introduit aussi les éléments suivants :
– seuils différents entre les différentes motorisation notamment pas de seuil pour les essence (ou assimilé) non id pour les particules,
– RDE en première phase non appliquée aux particules,
– non prise en compte des polluants émis hors combustion.
Parce que le dernier point me semble encore plus crucial, en permettant d’homologuer des véhicules sans tenir compte de la production de particules d’usure, on donne bien l’autorisation de commercialiser des véhicules bien lourds et pas du tout aérodynamiques donc on donne bien un permis de polluer.
Non mais elle le fait exprès : Paris est l’une des capitales européenne la plus polluée qui soit, et la dame, maire de Paris, donne des leçons à Bruxelles, lui reprochant d’être trop « laxiste » envers la pollution ! Trop forte ! On est la risée du monde avec elle.
https://www.caradisiac.com/pollution-et-mobilite-paris-mal-classe-en-europe-168381.htm
Il va déjà falloir sanctionner comme il se doit les salauds qui retirent le système de dépollution de leur voiture (M. les taxis par exemple) pour éviter les frais d’entretien de ces systèmes (vanne EGR par exemple).
Des contrôles de pollution ciblés, confiscation immédiate du véhicule. Les poumons de nos enfants se prennent des tonnes de micro particules cancéreuses de la part de véhicules neufs qui roulent beaucoup. Ça suffit.
Il y a toute de chaîne de fraudeurs qu’il faut sanctionner : constructeurs, garagistes, conducteurs.
Bien…. @panama +1
Si déjà les taxis 100 % thermique étaient interdit !
Facepalm…
C´est toi qui va Payer aux Taxis de nouvelles voitures?
On a déjà perdu au moins 10 ans ! 🙁
La première Prius date de 20 ans, le 1er prix d’une Prius est de 33 k€ et le 1er prix d’une Classe E est de 46 k€.
Maintenant, il faut nous expliquer pourquoi rouler au minimum en hybrides coûte plus cher et que depuis 20 ans, les taxis n’ont pas eu le temps de moins dépenser pour rouler soit en électrique ou en hybride.
… Quelle perte de temps !