Face à une crise financière majeure, Nissan annule son projet d’usine de batteries à Fukuoka et engage une profonde restructuration. Mais cet abandon ne pourrait-il se payer à moyen terme ?
Nissan renonce à son projet d’usine de batteries à Fukuoka
Le constructeur automobile japonais Nissan Motor Co. a officiellement annulé ses plans de construction d’une usine de batteries lithium-fer-phosphate dans la ville de Kitakyushu, située dans la préfecture de Fukuoka, au Japon. Ce projet, annoncé fin 2023, représentait un investissement de 153 milliards de yens, soit environ 918 millions d’euros, et visait à soutenir la stratégie de développement des véhicules électriques (VE) du groupe.
Un porte-parole de Nissan a confirmé vendredi que ce plan était désormais abandonné. La décision a été justifiée par une volonté d’optimiser « l’efficacité des investissements », à un moment où l’entreprise traverse une période financière particulièrement critique.
Une crise financière qui bouleverse les priorités stratégiques
L’abandon de ce projet phare s’inscrit dans un contexte de turbulences économiques profondes pour Nissan. En ce sens, dès novembre dernier, le constructeur a révélé des pertes massives, avec une chute de 94 % de ses ventes nettes lors d’un trimestre particulièrement faible. En réponse, la direction a annoncé des mesures drastiques : suppression de 9 000 postes dans le monde et réduction de 20 % de sa capacité de production.
Ces décisions illustrent l’ampleur de la crise que traverse l’entreprise, autrefois pionnière de l’électrification automobile avec la Nissan Leaf, aujourd’hui en perte de vitesse face à la concurrence croissante de constructeurs comme Tesla, BYD, et même ses compatriotes Toyota et Honda.
Une alliance avortée avec Honda pour tenter un sauvetage
Pour tenter de sortir la tête de l’eau, Nissan avait brièvement envisagé une fusion stratégique avec Honda Motor Co. Les deux géants automobiles avaient signé un accord pour créer une société holding commune, afin de regrouper leurs forces et mutualiser les investissements dans la technologie électrique et les chaînes d’approvisionnement.
Cependant, cette alliance a rapidement échoué, notamment en raison de désaccords liés aux rapports de pouvoir entre les deux marques. Le partenariat a été officiellement dissous en février, laissant Nissan sans filet de sécurité externe à court terme.
Une gamme de véhicules électriques et hybrides en retard
Un des principaux facteurs du déclin de Nissan est son manque de véhicules électriques compétitifs et de modèles hybrides attractifs. Alors que les consommateurs aux États-Unis, en Europe et en Asie se tournent massivement vers les technologies plus propres, Nissan accuse un retard important.
Ce désavantage concurrentiel est particulièrement visible sur les segments des VE et des hybrides, dominés par Toyota, où les marques chinoises et américaines gagnent du terrain.
Ivan Espinosa nommé pour piloter la restructuration
Pour redresser la barre, Nissan a procédé à un changement de gouvernance majeur. En avril, le Conseil d’Administration a nommé Ivan Espinosa au poste de Directeur Général. Ce dernier s’est engagé à mettre en œuvre une restructuration globale de l’entreprise afin de restaurer sa rentabilité et sa compétitivité sur le marché mondial.
Dans ce cadre, Nissan prévoit d’investir 1,4 milliard de dollars (environ 1,3 milliard d’euros) en Chine, un marché considéré comme crucial pour son avenir. Le constructeur y voit un terrain propice pour tester, développer et accélérer ses initiatives dans le domaine des VE, face à une concurrence locale féroce.
Des résultats annuels attendus sous haute tension
Nissan doit publier ses résultats annuels aujourd’hui, pour l’exercice clos au 31 mars. L’entreprise a déjà averti qu’elle devrait enregistrer une perte nette de 750 milliards de yens, soit environ 4,5 milliards d’euros, un déficit record largement lié aux frais de restructuration engagés.
Cette annonce pourrait avoir des répercussions majeures sur la stratégie à moyen terme du constructeur. Aussi, les analystes la scruteront de près, tout comme les actionnaires et l’ensemble de l’industrie automobile.
Crédit illustration : Nissan.
