C'était mal parti...
C'était mal parti...
par Nicolas Anderbegani

Rétro 30 ans déjà : RAC Rally 1994, Auriol premier champion du monde Français

Guy Fréquelin en 1981, Michèle Mouton en 1983 et déjà Didier Auriol en 1992 avaient frôlé la couronne. En 1994, Didier Auriol brisait enfin la malédiction qui avait déjà privé tant de fois un pilote de rallye Français du titre suprême. Mais rien ne fut facile dans cette épreuve finale du RAC Rally.

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Après sa victoire dans la douleur au rallye San Remo, Didier Auriol, sur Toyota Celica, dispose d’un avantage de 11 points, 110 à 99, sur son rival espagnol, « el matador » Carlos Sainz qui pilote pour Subaru. Là où le français a montré ses qualités de sprinter, avec 3 victoires, Sainz a joué la carte de la régularité, avec 1 seule victoire mais cinq autres podiums. Au départ du RAC, le pilote Subaru sait que ses chances de titre sont faibles mais si le français est hors du top 4, une victoire lui “suffirait”.

Galères pour Auriol

Pour Didier Auriol, après deux premières spéciales réussies où il montre qu’il est dans le coup, c’est la cata !  Dans la spéciale de Chatsworth, son copilote Bernard Occelli omet de mentionner un tas de grosses pierres situé à la corde d’un virage à droite en aveugle avec un dos d’âne. Auriol prend la trajectoire et tape fort, se retrouvant avec une roue pliée, forcé de terminer la spéciale au ralenti. Il perd plus de quatre minutes et se retrouve 94e ! Sainz s’en tire bien mieux, malgré un incident qui lui a fait endommager son radiateur et sa direction assistée en passant dans un gué. Pourtant, il se murmure dans le paddock que l’espagnol aurait été aidé par des concurrents pour sortir de son mauvais pas… Sur la très courte première étape de 46,61 km, Carlos Sainz est donc seulement devancé par Colin McRae, son co-équipier, leader pour 11s. Avec sa Toyota, Juha Kannkunen est au troisième rang à vingt secondes là.

Le samedi, le calvaire continue pour Auriol qui est victime d’un problème de turbo-compresseur qui lui coûte plusieurs minutes de retard supplémentaires et le relègue très loin au classement, à plus de vingt minutes. Au soir de la deuxième journée, Sainz, auteur de deux scratchs, est solidement accroché au podium, une minute derrière son funambule de coéquipier Colin McRae. Juha Kankkunen, 3ème, aurait pu exercé une pression sur l’espagnol mais une tête à queue dans la 19e spéciale et un mauvais choix de pneus l’ont relégué à plus d’une minute de Sainz, ce dernier étant donc un peu plus soulagé.

Sainz pas si serein

Retombé 17e au scratch après ses ennuis de turbo, Auriol est évidemment dans une situation peu avantageuse.  Il est parvenu à grimper dans le top 10 provisoire à la fin de la seconde étape…mais à douze minutes d’une septième place qui pourrait lui permettre d’être titré. De son côté, Sainz aimerait sans doute bénéficier d’une consigne de course qui lui permettrait de passer McRae. Pas simple, car McRae, intouchable, file vers sa première victoire, près de chez lui. Les deux pilotes ne s’apprécient guère et David Richards, le patron de l’écurie Subaru, ne semble pas prêt à sacrifier son poulain. IL se murmure dans le paddock que Subaru ne demandera rien à McRae. Le langage non verbal et les propos de Sainz en interview trahissent cette tension : « nous n’en avons pas beaucoup parlé » rétorque-t-il avec une moue qui en dit long.

La "cata" pour Sainz

A condition qu’il ne rencontre plus ennui, Auriol, 9ème au matin de la dernière étape, devrait rapidement récupérer la 8e place de Makinen , mais la 7ème position, qui serait synonyme de titre, est hors de portée car Vatanen dispose de 12 minutes d’avance. Si Auriol parvenait finalement à entrer dans le top 7, Subaru serait alors contraint de donner une consigne à McRae pour que Sainz décroche le titre.

Dimanche matin, dans le premier chrono du jour, Pantperthog, Sainz signe encore un chrono remarquable mais compte alors près de deux minutes de retard sur McRae. L’écossais semble indétrônable. L’espagnol n’est sans doute pas dans les meilleurs dispositions d’esprit, avec Auriol qui peut remonter, McRae intouchable et une équipe Subaru qui n’est pas prête à lui rendre service.

Dans la 24 spéciale, le destin du titre bascule définitivement. L’espagnol va commettre l’irréparable alors que tout était encore sous contrôle. Au beau milieu de la forêt galloise, Sainz commet une erreur rédhibitoire. Il perd le contrôle de la Subaru, part en glissade et vient taper contre un talus, endommageant l'avant et le moteur de l'Impreza. C'est terminé !  L’histoire ne saura jamais si Subaru allait faire gagner Sainz…Demander à Colin McRae de freiner, à domicile de surcroît, semblait bien trop difficile pour David Richards.

Auriol et McRae dans l'histoire

Pour Auriol, très loin du compte depuis le départ, cette nouvelle est évidemment une délivrance : “J’ai su en écoutant la radio, juste avant le départ de la spéciale, que Carlos était sorti. Bernard m’a dit que nous étions champions du monde, je ne voulais pas le croire, mais nous avions bien entendu. Ensuite, j’ai eu du mal à me concentrer. J’ai conduit très mal, et je suis même sorti de la route. Ça y est, je suis le premier Français champion du monde. C’est dur pour Sainz, mais j’ai déjà vécu ça. Maintenant, je suis tout sourire, mais il y a peu j’avais la larme à l’œil.”

Sixième à l’arrivée de ce RAC à plus de 30 minutes du vainqueur McRae, Didier Auriol devient le premier pilote français à inscrire son nom au palmarès du championnat du monde des rallyes, ouvrant la voie à une période dorée dans les années 2000-2010. Colin McRae a été impérial et s’impose avec plus de 3 minutes d’avance sur Juha Kankkunen. Pour la première fois depuis 18 ans, un sujet du Royaume-Uni s’impose sur ses terres. Cela annonce une saison 1995 encore plus mémorable pour l’écossais.

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Pour résumer

En 1994, Didier Auriol décroche enfin le titre de champion du monde des rallyes avec Toyota. C'est la première fois qu'un Français obtenait ce sacre. C'est au bout du suspense, lors du redoutable RAC Rally, que la décision se fit entre lui et son rival Carlos Sainz.

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