Essai Chevrolet Corvette C8 Stingray – Retournement de situation
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par Cedric Pinatel

Essai Chevrolet Corvette C8 Stingray – Retournement de situation

En rejetant enfin son moteur en position centrale arrière, la Chevrolet Corvette entre de plain-pied dans le monde des supercars « junior » où évoluent McLaren, Lamborghini ou Audi. Le style fait jaser mais au volant, les prestations proposées et les sensations font tourner la tête quand on regarde la grille des tarifs.

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Une Corvette à moteur central ? L'idée hantait déjà l'esprit de Zora Arkus-Duntov au début des années 60. Le regretté ingénieur en chef de la sportive américaine, impliqué dans le développement de la voiture depuis la toute première génération du modèle, rêvait d'une sportive à moteur central arrière pour améliorer ses performances et battre la concurrence. Mais malgré de nombreux concept-cars présentés entre 1964 et 1990 et quelques projets crédibles, la Corvette a toujours gardé son moteur à l'avant au fil des sept générations de modèle. Jusqu'à l'arrivée de cette fameuse C8 Stingray qui ose enfin passer à une architecture en position centrale arrière. Avant de crier au blasphème, prenez donc le temps de consulter les archives de Chevrolet et de détailler tous les prototypes de Corvette pourvus d'un moteur derrière les occupants.

Abordons aussi le point le plus clivant de la voiture, son style qui fait couler beaucoup d'encre depuis sa présentation officielle l'année dernière aux Etats-Unis. Après une septième génération déjà très agressive pour ne pas dire vulgaire, la C8 en rajoute encore une couche avec une carrosserie bourrée de détails intrigants et des proportions déroutantes sous certains angles. Assez bizarre en photo, la C8 Stingray possède en tout cas l'allure d'une vraie supercar quand on l'observe dans la circulation. En rouge, les béotiens la prennent désormais pour une Ferrari et les connaisseurs lui trouvent des airs de Honda NSX. En cherchant bien, vous verrez même une découpe de capot avant rappelant la Lamborghini Aventador.

L'installation à bord déroute tout autant que la présentation extérieure avec un habitacle à l'ergonomie surprenante, équipé d'une console centrale dont l’extrémité comprend un long bandeau constellé de boutons qui court jusqu'au tunnel de transmission. La qualité de finition et la technologie se situent à des années-lumière de l'ancienne Corvette. Avec de jolis cuirs et autres surfaces en Alcantara partout, un système d'infotainment moderne et efficace ou même des matières douces pour protéger votre genou droit en conduite sportive, on se sent dans une GT luxueuse plutôt qu'une Corvette radicale.

Cette impression se renforce dès les premiers mètres parcourus, une fois le discret V8 démarré et la transmission positionnée en mode « Drive ». Avec l'amortissement piloté Magneride qui équipe nos modèles d'essai (option à 2 420€), la Corvette profite d'une douceur de suspension qui rappelle l'Audi R8 et ferait passer une 911 pour une sportive trop extrême. En mode normal, la boîte à double embrayage égraine ses rapports sans le moindre à-coup et le moteur glougloute discrètement en arrière-plan. En quelques secondes, voilà déjà la Corvette passée du stade de voiture de sport rugueuse à celui de talentueuse voyageuse. Dans la vie de tous les jours, elle se positionne sans problème en reine de la polyvalence. Quelle surprise !

Plus du tout les mêmes sensations

Fini le long capot qui dépasse du pare-brise, la vision vers l'avant évoque désormais l'univers des super-sportives du marché de l'automobile d'exception. La position de conduite et la distance du pare-brise rappellent là encore l'Audi R8, avec une direction un peu plus lourde et consistante. A la première accélération franche, mode Track activé, la poussée reste logiquement en-dessous d'une McLaren 570S ou d'une R8 Performance : avec 482 chevaux dans sa version européenne, le V8 atmosphérique de 6,2 litres boxe plutôt dans la catégorie du flat-six de la 911 Carrera S et de ses 450 chevaux. A ce propos, sa sonorité paraît quand même très feutrée et le rupteur, perché à 6600 trs/min, arrive vite. En ligne droite, le 0 à 100 km/h expédié officiellement en 3,5 secondes paraît quand même optimiste au regard des sensations : subjectivement, la Porsche cogne au moins aussi fort. Il y a quand même de quoi atteindre rapidement les 260 km/h sur les autoroutes allemandes de notre théâtre d'essai, avec une qualité d'amortissement et une sérénité qui forcent le respect.

Mais c'est bien au moment où vous tournez le volant pour la première fois en conduite sportive sur une route de campagne que la C8 se différencie le plus des anciennes Corvette. La rapidité de la direction, le tranchant du train avant et les réactions de la voiture procurent des sensations propres aux seules super-sportives à moteur central arrière. On sent tout de suite une motricité bien supérieure sur le train arrière et un train avant qui permet de bien juger les limites de grip. La boîte à double embrayage offre une bonne réactivité en mode manuel, sans atteindre l'excellence d'une PDK de 911. Malgré une pédale de gauche à l'attaque un peu molle, les freins marchent aussi très bien et ne perdent pas en endurance. Alors qu'on commence à hausser le rythme sur les routes autour de Francfort, des pluies torrentielles s'abattent soudainement sur la région. Nous voilà réduits, avoir avoir entrevu des capacités d'un très haut niveau, à conduire sagement avec cette machine sur une chaussée gorgée d'eau jusqu'à la fin de la journée d'essai. Bonjour la frustration...

Sur circuit, tout pour chasser le chrono

Heureusement, je me retrouve quelques jours plus tard sur la piste Club de Magny-Cours pour en reprendre le volant dans le cadre de l'élection de la sportive de l'année du magazine Motorsport (numéro à paraître en décembre). Et même entourée de machines aussi extraordinaires que la nouvelle Porsche 911 GT3 ou la Lamborghini Huracan STO, l'Américaine fait forte impression sur circuit. Mode Track 2 activé avec les aides à la conduite déconnectées, la C8 ne demande qu'à enchaîner les tours et procure beaucoup de plaisir. Forte d'une motricité extraordinaire en sortie de virage, elle offre ce qu'il faut de sous-virage pour sentir les limites en virage et pivote promptement au lever de pied. Dotée en série du Pack Z51 sur notre marché (freins Brembo plus gros, Suspension renforcée, échappement sport, Michelin Pilot Sport 4S, différentiel à glissement limité électronique, refroidissement optimisé), elle met tout de suite en confiance, tolère les excès et ne devient jamais pointue. On regrette un certain manque d'expressivité du V8, dont la zone rouge assez basse peut parfois vous surprendre à la ré-accélération. Avec un châssis aussi efficace et permissif, on voudrait tout simplement disposer d'un moteur bien plus puissant. Car oui, on en avait oublié qu'il ne s'agit là que du modèle de base de la Corvette, vendu 21 500€ moins cher qu'une Porsche 911 Carrera d'entrée de gamme. Et sur la piste club, nos confrères l'ont chronométrée aussi rapide qu'une Carrera S (125 792€ en prix de base)...

Targa ou Cabriolet

Notons que la C8 Stingray coupé reste techniquement un « targa », dont le toit se détache manuellement et peut se ranger dans le coffre. Mais sans son toit, la Stingray Coupé produit beaucoup de bruits d'air au-dessus de 70 km/h, qui deviennent insupportables à partir de 90 km/h. Baisser les vitres permet de réduire les nuisances sonores et aérodynamiques, mais il faudra vraiment opter pour le cabriolet si vous voulez rouler cheveux au vent en Corvette à vitesse autoroutière. La C8 Cabriolet, dotée du même châssis en aluminium et d'un mécanisme de toit en dur rappelant celui des McLaren et de la Ferrari F8 Tributo, ne pèse que 37 kilos de plus que le coupé. Sachant que les pertes en rigidité sont quasiment nulles par rapport au coupé qui dispose lui aussi d'un toit ouvert, vous pourrez vous rabattre sur cette version pour profiter du meilleur agrément sans sacrifier de l'efficacité dynamique.

Vivement la suite

88 620€. Voilà le prix de la Corvette C8 Stingray coupé, équipée de série du pack Z51 et d'un intérieur bourré d'options à la finition impeccable. Chez Porsche, cette somme vous donnera seulement accès à un 718 Cayman GTS de 400 chevaux. La 911, elle, débute à 110 192€ dans sa variante Carrera (385 chevaux) sans la moindre option dynamique. Une Audi R8 démarre à près de 150 000€ en version RWS (540 chevaux) et les modèles de chez Lamborghini ou McLaren dépassent les 200 000€. Reine absolue du rapport prix-performances, la Nissan GT-R se négocie désormais à 111 000€. Dans ce contexte et malgré le malus maximal commun à tous ces modèles, l'addition de la nouvelle Corvette ressemble à un hold-up. Aussi plaisante qu'efficace à piloter y compris sur circuit, elle est devenue plus confortable qu'une 911 et rivalise avec cette dernière en matière de performances. Et encore une fois, il ne s'agit que du modèle de base : quand on voit la fiche technique de la toute dernière Z06 avec son V8 atmosphérique de 680 chevaux ruptant à 8600 tours / minute, il y a potentiellement de quoi devancer une 911 GT3.

A chaque nouvelle génération de Corvette, on se demande si l'Américaine pourra battre la Porsche 911. Avec la C8, cette question se pose plus que jamais. La nouvelle Stingray réussit le tour de force de passer à une architecture de pointe sans le prix élitiste qui va normalement avec. Zora Arkus-Duntov aurait probablement adoré, même si elle ne gagnera aucun concours d'élégance.

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Pour résumer

En rejetant enfin son moteur en position centrale arrière, la Chevrolet Corvette entre de plain-pied dans le monde des supercars « junior » où évoluent McLaren, Lamborghini ou Audi. Le style fait jaser mais au volant, les prestations proposées et les sensations font tourner la tête quand on regarde la grille des tarifs.

Cedric Pinatel
Rédacteur
Cedric Pinatel

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