Toyota Auris : galop d'essai
par Pierre-Laurent Ribault

Toyota Auris : galop d'essai

Toyota a beau être le premier producteur de voitures au monde, le géant japonais est encore un joueur de second rang en Europe. La faute aux habitudes particulières des automobilistes du vieux continent : alors que le monde entier roule en Corolla, la voiture mondiale par excellence n’a jamais vraiment séduit l’Europe qui préfère massivement les compactes cinq portes économiques, le fameux segment C qui ramène le pain quotidien chez les constructeurs européens. 308, A3, Astra, C4, Focus, Golf, Leon, Mégane, Octavia…

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Comme les Coréens, Toyota a décidé en 2006 de se lancer sérieusement à l’assaut de ce bastion avec une auto faite sur mesure, l’Auris. Le résultat a été mitigé. Malgré une déclinaison hybride originale, la japonaise dotée d’un style et de prestations un peu timides n'a pas réussi à renverser l'ordre établi. Pas grave, on efface tout et on recommence avec l’Auris 2 en 2012 qui vient d’être mise sur le marché au Japon avant sa présentation européenne au Mondial de l'Automobile. Nous avons pu en prendre le volant pour quelques premières impressions avant un essai plus complet de la version européenne plus tard dans l’année.

La première Auris n’ayant pas parfaitement atteint sa cible, Toyota a décidé d’être plus hardi avec la nouvelle génération. L’idée est de proposer un design original dans la catégorie, à l’esprit et au comportement dynamique, un caractère penchant, en termes européens, plus du côté latin que du côté nordique. Pour ce faire le design a été confié en parallèle et en compétition aux bureau de style japonais et niçois et le résultat final reçoit des éléments des deux propositions. L’Auris 2 garde une silhouette proche de la précédente, sur lesquelles se greffent un avant plus acéré et un arrière plus sculpté intégrant des feux taillés en pointe selon la tendance du moment. On retrouve, à l'avant comme à l'arrière, une ouverture trapézoïdale dans le bouclier soulignée de chrome qui donne une touche de sophistication sur une carrosserie par ailleurs sobre dans son exécution.

 

Dans la circulation japonaise, un pays où les voitures “normales” au sens européen sont en nette perte de vitesse au profit des kei cars, des monospaces de toutes tailles et de l’omniprésente Prius, le design de l’Auris la fait indéniablement remarquer, plutôt favorablement. En Europe où on la trouvera plus certainement roulant derrière une Mégane et devant une Golf de même gabarit global, le caractère distinctif sera sans doute plus atténué mais le style de cette nouvelle Auris ressort comme plus ambitieux que la précédente, y compris dans la livrée blanche de la première de nos voitures d’essai, une 150X "S package" figurant un modèle de milieu de gamme.

Une fois la porte ouverte, on déchante un peu. Là où l’extérieur ose, l’intérieur reste très sobre. L’assemblage est solide et les matériaux témoignent d’un effort de se mettre dans la peau du client européen. Le haut de la planche de bord est en plastique moussé comme le haut des contreportes, un point souligné par tous les intervenants que nous avons rencontrés. Sans doute le traumatisme du verdict "plastique dur !" asséné sans relâche par la presse européenne dès qu'on s'éloigne des canons du genre. Le volant est gainé et une couture court le long de la planche de bord témoignent un effort de sophistication. Un bon point pour les contrôles, simples mais de bonne ergonomie, le coup d'arrêt à l'éruption de boutons sur la console et les sièges au bon maintien.

C'est propre, efficace, mais l’ensemble manque terriblement de fantaisie à l’heure où la compétition dans l’habitacle prend de la vigueur chez les concurrentes comme le montre la Hyundai i30 récemment essayée ici même. Il est à vérifier si la version made in Burnaston qui arrivera sur les routes de l’hexagone aura la même sobriété. L’habitabilité est en progrès dans toutes ses dimensions et le coffre de 360 litres dispose d’un double fond (où prendront place les batteries de la version hybride ?). La longueur de 4,275 m est en augmentation de 3 cm, la largeur reste la même à 1,760 m et la hauteur à 1,460 m perd 5 cm. Les deux modèles essayés disposaient d’un toit en verre panoramique.

Les motorisations japonaises sont reprises de la version précédente et partagées avec la Corolla. La première version essayée, la blanche sur les photos, est la 150X "S package". La 150X constitue l'entrée de la gamme et est dotée du moteur 1,5l essence 108 ch/136 Nm couplé à une boîte CVT. Il ne sera pas disponible sous la même forme en Europe, pas plus que le 1,8l, les deux étant remplacés par les 1,3l et 1,6l déjà connus. La différence de cylindrée est due aux conducteurs japonais qui n’ont absolument pas le goût de la boîte mécanique, vue comme compliquée dans le meilleur des cas et primitive pour la majorité, et la CVT demande un peu plus de muscle pour garder un comportement acceptable.

Il y a pourtant cette fois dans la gamme une Auris 1,8l RS à boîte mécanique 6 rapports mise en avant pour accentuer l’image sportive que Toyota veut donner a sa voiture dans l’archipel. C'est notre autre voiture d'essai, équipée elle du 1,8l de 144 chevaux. L’ingénieur en chef du projet Fujita-san sourit, sans illusion, lorsque nous lui demandons s’il compte en vendre beaucoup...

Pas de motorisation diesel ni hybride au Japon, ce sera pour l’Europe. La CVT ne met pas longtemps après la mise en mouvement à rappeler sa caractéristique habituelle : “Oui, je sais, l’effet d’élastique” nous dit Kuwada-san, très sympathique ingénieur en charge du développement CVT chez Toyota. “On pourrait l’atténuer plus, mais comme la priorité est à la consommation, on optimise le régime moteur dans ce sens. Ça n’est pas une fatalité, sur la 1,8l en mode sport nous avons pour la première fois un programme qui simule des passages de rapport et qui rappelle au conducteur le comportement d'une boîte auto. De plus elle utilise un capteur de mouvement pour adapter le régime en virage et faciliter la relance”. Ça bouge chez les CVTs...

En attendant, la version 1,5l n’est pas un foudre de guerre. Elle se déplace néanmoins sans drame, profitant d’une tenue de route rassurante et d’un amortissement très correct qui inciteraient presque à plus d’audace si la languide transmission ne ramenait à une progression moins frénétique. La 1,5l est équipée de série au Japon d’un stop start. RAS serait-on tenté de conclure au sujet de l’expérience routière de cette version. La 1,8l RS et sa boîte manuelle nous attend.

Curiosité toujours bienvenue pour l’amateur dont les occasions de tâter de la pédale d’embrayage se font de plus en plus rares, la fameuse boîte mécanique (qui n'est "que" la boîte qui équipera la majorité des ventes européennes) s’accompagne ici de suspensions réglées plus fermement et d’un traitement discrètement sportif de l’habitacle où les sièges prennent une teinte rouge et des bords plus marqués façon baquet. Les rapports s’enclenchent avec une précision de bon aloi et c’est parti. Et c’est une bonne surprise. Les trois premiers rapports sont intentionnellement courts et le moteur répond présent, montant sans complexe vers la zone rouge dans un bruit rauque un peu canaille qu’on imaginait pas dans cette auto, et on se prend à enfiler les courbes avec plaisir.

Bien sûr, les 144 chevaux ne font pas illusion bien longtemps, mais il y a de quoi conduire gaiement à allure soutenue d’autant que le comportement est tout à fait à la hauteur. L’Auris a fait un stage en Belgique lors de son développement où elle a été confiée aux mains expertes des essayeurs européens du constructeur qui, on le laisse entendre sans le confirmer, l’auraient emmenée faire un tour du côté de l’Eifel en plus de la comparer longuement avec ses futures rivales. Le comportement routier, dorénavant mis en avant dans toutes les présentations récentes de nouvelles Toyota, est clairement monté dans la short-list des priorités chez le constructeur. L’influence d’Akio-san ?

Les différences importantes entre cette version japonaise et la version européenne, ne serait-ce que sur les motorisations, empêchent de tirer des conclusions trop rapides mais il transparait lors de cette prise de contact que Toyota a pris le taureau par les cornes et revu son auto en profondeur dans le but de se faire admettre cette fois au carré VIP du segment C. Au Japon l’Auris ne sera qu’une des multiples offres de Toyota et visera une clientèle spécifique, se démarquant dorénavant nettement de la Corolla dont elle est une cousine de plus en plus éloignée, mais c’est en Europe que l’attend sa vraie carrière. Elle pourrait bien, en particulier grâce à sa version hybride sans équivalent direct sur ce segment (Toyota s'attend à vendre versions essence, diesel et hybrides en proportions égale) et un package nettement plus proche des attentes locales, multiplier le nombre de ses amateurs. On y reviendra.

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Toyota a beau être le premier producteur de voitures au monde, le géant japonais est encore un joueur de second rang en Europe. La faute aux habitudes particulières des automobilistes du vieux continent : alors que le monde entier roule en Corolla, la voiture mondiale par excellence n’a jamais vraiment séduit l’Europe qui préfère massivement les compactes cinq portes économiques, le fameux segment C qui ramène le pain quotidien chez les constructeurs européens. 308, A3, Astra, C4, Focus, Golf, Leon, Mégane, Octavia…

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