Grand Prix de Bahrein : flou artistique de rigueur
par Pierre-Laurent Ribault

Grand Prix de Bahrein : flou artistique de rigueur

Comme on pouvait malheureusement s'y attendre, la situation ne s'est pas améliorée à Bahrein depuis l'évacuation manu militari des manifestants jeudi. C'est même de pire en pire. Alors que le Roi, débordé, tente de lancer un appel au dialogue et à l'apaisement, ses troupes, dont on peut se demander s'il les commande toujours réellement, tirent dans le tas de plus belle. Et la F1 dans tout ça ? On tourne à Barcelone, et on évite soigneusement le sujet.

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Depuis les nouvelles actions brutales des unités de maintien de l'ordre d'hier, le ton monte progressivement dans les capitales étrangères vis-à-vis de la classe dirigeante qui semble engagée bon gré mal gré dans la voie de l'affrontement direct avec sa population. Les Britanniques et les Français viennent de bloquer toute exportation de matériel sensible vers Bahrein (du gaz lacrymogène aux armes à feu), et les chancelleries multiplient les appels, de plus en plus fermes, à la modération et à l'ouverture du dialogue. Les gouvernements américain, anglais, canadien et australien viennent même de déconseiller officiellement à leurs ressortissants de se rendre dans le Royaume.

Pendant ce temps, la F1 tergiverse, de plus en plus pathétiquement. Ecclestone a donné une interview assez surréaliste hier dans laquelle, contrairement à tout ce que les médias sur place indiquent, il assurait que les choses avaient l'air de s'arranger (après un entretien téléphonique avec le Prince), et qu'il se donnait encore une petite semaine. Ce matin il est revenu sur ses déclarations et admet désormais que les circonstances n'ont pas l'air favorables, mais réserve encore sa décision jusqu'à la fin du week-end.

Christian Horner, au nom des constructeurs, prend bien soin de ne rien en penser et s'en remet à la FIA, dont le silence est assourdissant, et la FOM, et aucun acteur, pilote, team manager, ne se risque à une prise de position claire à l'exception de Niki Lauda qui comme d'habitude ne mâche pas ses mots et pense qu'il ne faut pas y aller. Il a raison. Il est désormais évident que les tests du début mars, et le Grand Prix qui suit, ne pourront avoir lieu. Ne serait-ce que parce qu'à partir du moment où un pays donne le conseil de ne pas se rendre sur place, les assurances refusent de couvrir.

A leur décharge, la position actuelle ultra-prudente de la part des écuries, et même de Bernie, est explicable. La tenue du Grand Prix implique des contrats dans tous les sens entre les organisateurs, la FIA, la FOM, les écuries, les sponsors, et la seule façon de s'en sortir pour tout le monde est le cas de force majeure qui empêche la tenue du Grand Prix. Si une décision unilatérale est prise trop tôt, on entre dans un système de rupture de contrat, pénalités, non paiement de droits, etc. D'autre part, et c'est un facteur qui joue indirectement, il y a beaucoup d'argent en provenance du Golfe investi en Formule 1. Pour mémoire, le groupe McLaren est détenu à 30% par la Mumtalakat Holding Company, qui gère les intérêts du Royaume de Bahrein. 15% des parts de Daimler appartiennent à des fonds d'investissements en provenance du Koweit et des Emirats Arabes Unis. Or les pays du Golfe, très nerveux à l'idée de la contagion dans leurs propres pays, ont affirmé hier leur ferme soutien à la dynastie reignante à Bahrein. On imagine comment une déclaration par Martin Whitmarsh ou Norbert Haug qui pourrait être interprétée comme un soutien aux manifestants serait accueillie... La F1 se trouve donc prise entre le marteau et l'enclume.

Mais il ne faudrait pas continuer à nier l'évidence encore trop longtemps. Les fans, qui ont pris majoritairement le parti de l'annulation, manifestent de plus en plus bruyamment leur impatience dans les réseaux sociaux, avant que le grand public ne s'y mette également. Chaque heure qui passe sans décision ne fait rien pour la gloire de la F1.

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Pour résumer

Comme on pouvait malheureusement s'y attendre, la situation ne s'est pas améliorée à Bahrein depuis l'évacuation manu militari des manifestants jeudi. C'est même de pire en pire. Alors que le Roi, débordé, tente de lancer un appel au dialogue et à l'apaisement, ses troupes, dont on peut se demander s'il les commande toujours réellement, tirent dans le tas de plus belle. Et la F1 dans tout ça ? On tourne à Barcelone, et on évite soigneusement le sujet.

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